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Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mardi 18 octobre 2022 à 17h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer :

Les crédits budgétaires que je vous présente ont vocation à augmenter les moyens nécessaires au fonctionnement du ministère de l'intérieur, dont j'ai l'honneur de commander les femmes et les hommes courageux.

Sous le quinquennat précédent, 10 milliards d'euros avaient été octroyés au ministère de l'intérieur ; en 2023, la marche budgétaire que forment le projet de budget et le projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP), donne une traduction concrète à la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), adoptée cet après-midi au Sénat par une très large majorité.

La mission Sécurités prend en charge la stratégie du doublement de la présence des forces de l'ordre sur l'espace public. Nous vous demandons la création de 8 500 emplois au ministère de l'intérieur, dont 3 818 équivalents temps plein (ETP) au titre de 2023. Les re-créations de postes de policiers et de gendarmes sont prévues pour intervenir au cours des deux premières années budgétaires, de sorte que nous soyons prêts à recevoir la Coupe du monde de rugby en 2023 et les Jeux olympiques en 2024.

La police et la gendarmerie nationales seront les bénéficiaires de 95 % de ces créations d'effectifs. Sur ces 2 850 nouveaux ETP, 1 640 seront répartis dans les dix-huit unités de forces mobiles (UFM), dont onze nouvellement créées – sept de gendarmerie mobile et quatre de compagnies républicaines de sécurité (CRS) – et 1 266 seront envoyés dans les circonscriptions de sécurité publique prioritaires, c'est-à-dire là où la délinquance est la plus forte et où le nombre de policiers fait le plus grandement défaut. Les réserves opérationnelles de police et de gendarmerie seront également renforcées, jusqu'à atteindre 50 000 personnes en 2027.

La politique territoriale du ministère s'affirme, en premier lieu, par la re-création, pour la première fois, des effectifs des préfectures – 50 l'année prochaine, un peu moins de 400 au cours du quinquennat. En second lieu, par l'augmentation des crédits de vidéoprotection qui progressent tous les ans de 5 millions d'euros dans le cadre de la Lopmi, et qui viendront abonder le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), bien connu des élus. En troisième lieu, par des moyens, hors personnel, extrêmement élevés : 4 800 nouveaux véhicules seront acquis pour la police nationale et la gendarmerie nationale, après les 13 310 qui sont venus remplacer les sept huitièmes des deux parcs, dans le cadre du plan de relance. Une attention particulière sera accordée à la nouvelle politique d'achat, à hauteur de 250 millions d'euros, des tenues des policiers : elles seront désormais fabriquées en France, dans un tissu français, ce qui n'était pas le cas dans les derniers appels d'offres lancés par le ministère d'intérieur. La première marche du réseau Radio du futur, accepté par le Sénat, sera engagée cette année, à hauteur de 250 millions d'euros – l'appel d'offres a été lancé et le marché signé avec la société Airbus. Trente-six nouveaux hélicoptères viendront équiper la gendarmerie nationale et la sécurité civile.

J'en viens à la cybercriminalité, menace à la fois actuelle et pour demain. En 2021, les forces de l'ordre ont enregistré 260 000 procédures judiciaires liées à la cybercriminalité, soit une progression de 20 %. Plus de la moitié des escroqueries sont le fait de cyberattaquants ; elles touchent sans distinction nos concitoyens et les entreprises.

Le budget pour 2023 prévoit la création de cyberpatrouilleurs, en augmentation de 50 %, la mise en place du numéro d'urgence « 17 cyber », en attendant le vote de la Lopmi pour engager d'autres volets de notre politique de lutte contre la cybercriminalité. Celle-ci ne se substitue pas à la présence sur la voie publique ou sur le terrain, elle la complète.

Les investissements très importants pour la modernisation des services numériques du ministère de l'intérieur se poursuivent. En 2023, 700 millions sont consacrés au seul numérique du ministère, à la fois pour renforcer Pharos et la plateforme Thésée, lancée en mars dernier et dédiée à la lutte contre les e-escroqueries ; mettre en œuvre la plainte en ligne – la visio-plainte –, que la Lopmi autorise ; développer l'application « Ma Sécurité » et le portail de signalement des violences conjugales, lancé par la Première ministre.

Les outre-mer, puisque j'en suis le ministre, bénéficieront d'un effort sans précédent, avec une forte progression des effectifs et des moyens budgétaires. Pour Mayotte, l'effort prend la forme du plan Shikandra 2, sur lequel je travaille à la suite de ma visite sur ce territoire. Pour la Guyane, il s'agit du renforcement des effectifs que j'ai annoncé lorsque je m'y suis rendu, de l'opération Harpie, qu'il convient sans doute de revoir de fond en comble, ainsi que la re-création des brigades de recherche de gendarmerie de Saint-Laurent-du-Maroni et des antennes de l'Office anti-stupéfiants (Ofast) à Cayenne. Je ne vais pas détailler toutes les annonces pour chaque territoire d'outre-mer, mais je voulais faire un zoom particulier sur Mayotte et la Guyane.

Nous préparons activement la Coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques de 2024. Les marches budgétaires, en termes de création d'effectifs comme en moyens budgétaires, sont très importantes – déjà 200 millions s'ajoutent aux moyens budgétaires et matériels évoqués pour les JO.

Le programme Immigration et asile enregistre une progression de plus de 18 % de ses crédits. Cela couvre la création de 2 200 places supplémentaires en centres de rétention administrative (CRA), un chiffre jamais atteint jusqu'à présent. Le prochain débat sur le projet de loi « immigration » sera l'occasion d'évoquer l'éloignement des étrangers en situation irrégulière pour motif d'ordre public – 3 000 ont déjà été expulsés depuis un an. Nous nous mobilisons pour que la loi qui nous permettra demain d'être plus efficaces soit au rendez-vous budgétaire des années 2023 et 2024. Au passage, je souligne que les services des préfectures ont refusé de délivrer ou renouveler 70 000 titres en un an et demi, en raison d'une inscription au casier judiciaire, ce qui n'était pas le cas avant 2020. Les agents de préfecture, en lien avec la police et la gendarmerie nationale, disposent désormais des moyens qui le leur permettent.

En matière d'accueil des demandeurs d'asile et d'examen de leur situation, les délais de traitement ont pu être améliorés grâce aux efforts budgétaires que vous nous avez consentis au cours des deux dernières années. En 2020, 200 emplois supplémentaires ont ainsi permis de réduire les délais de décision : 170 000 décisions ont été prononcées en 2020 et en 2021, dans le délai d'instruction de deux mois qui avait été fixé par le Gouvernement – promesse tenue, donc, alors même que les délais de recours devant la justice administrative rendent les choses fort complexes.

Le délai de traitement des demandes d'asile a un impact direct sur le montant de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA), dont l'octroi est un peu automatique, si j'ose dire. Pour 2023, nous avons évalué l'ADA à 321 millions d'euros, ce qui ne me paraît pas un mauvais chiffre puisque, sur les 491 millions inscrits en loi de finances 2022, nous en avons consommé 388.

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