Si nous examinons des crédits qui relèvent de deux ministères, il nous faut porter aussi un regard sur l'ensemble de l'aide publique au développement (APD) – qui s'élève au total à plus de 14,8 milliards d'euros en 2022 – soit l'agrégat permettant les comparaisons internationales.
Le budget de la mission s'accroît de 21,45 % en autorisations d'engagement et de 16,4 % en crédits de paiement, soit une augmentation importante, de 820 millions, l'une des plus importantes parmi les missions du présent PLF.
Les orientations définies par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) sont globalement respectées. L'APD va représenter cette année 0,55 % du revenu national brut (RNB) : rien à dire, l'objectif est atteint. En revanche, il ne l'est pas tout à fait pour ce qui concerne la part de l'aide bilatérale et les dons. La proportion d'aides multilatérales est encore trop importante à mon gré, et l'on continue à privilégier les prêts, ce qui est d'ailleurs dans l'ADN de notre principal opérateur, l'Agence française de développement (AFD), puisqu'il s'agit d'une banque.
Autre difficulté : les dix-neuf pays que nous considérons comme prioritaires ne bénéficient que de 13 % de l'aide française. Ce n'est pas uniquement du fait de la France. Ainsi, on ne peut plus décemment aider l'État malien, vu l'attitude qui est la sienne. La question va probablement se poser très vite dans les mêmes termes pour le Burkina Faso.
La hausse très sensible des autorisations d'engagement est quant à elle liée aux prêts ; les taux d'intérêt augmentant, on anticipe la future hausse des crédits de paiement.
Ce que je trouve positif, c'est l'intérêt de plus en plus marqué pour l'aide humanitaire, et plus encore l'aide alimentaire, qui était complètement négligée par notre pays il y a encore quatre ou cinq ans. Les dépenses humanitaires atteindront cette année 642 millions d'euros. Nous apportons cette aide dans un cadre bilatéral, mais aussi dans un cadre multilatéral puisque nous sommes revenus parmi les dix principaux contributeurs du Programme alimentaire mondial (PAM). C'est la conséquence directe des crises – à l'époque où il était ministre, M. Le Drian s'était particulièrement investi à ce sujet –, mais pas seulement. Par exemple, en Tunisie, qui n'est pas un pays pauvre, la question alimentaire se pose, ne serait-ce que du fait de la très forte augmentation des prix.
Je voudrais appeler plus particulièrement votre attention sur deux points.
D'abord, les annulations de dette. Nous ne disposons d'aucune information sur le sujet, alors que des sommes considérables sont en jeu. C'était déjà un problème il y a une quinzaine d'années, mais qui s'est ensuite amenuisé, le contexte devenant plus favorable pour les pays les plus pauvres. La question se pose à nouveau. Nous risquons d'être confrontés à des abandons de créances très importantes dans les prochaines années. Évitons de regarder passer les trains et donnons-nous les moyens d'examiner cela de plus près, comme le font les parlements d'autres pays.
Ensuite, la Chine est toujours considérée comme un pays en développement : c'est paradoxal ! Cela l'est d'autant plus qu'elle est en train de devenir l'un des premiers pays donateurs. Elle mène une politique très particulière, fondée sur de l'aide liée. Sa situation est en outre assez ambiguë, puisqu'elle est à la fois bénéficiaire de l'aide et un concurrent, notamment dans les appels à projets. Je considère que ce point devrait être lui aussi être examiné par le Parlement.
En conclusion, je considère que le présent budget est conforme à la politique que nous avons définie collectivement dans la loi de 2021, et je donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission et du compte de concours financiers.