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Intervention de Caroline Cayeux

Réunion du jeudi 13 octobre 2022 à 10h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Caroline Cayeux, ministre déléguée :

Je tiens d'abord à rappeler que nous avons commencé par écouter. Avec MM. Christophe Béchu et Gabriel Attal, j'ai reçu, à de nombreuses reprises, les présidents d'associations d'élus. M. Christophe Béchu et moi-même ayant été élus locaux, maires, présidents de département ou conseillers régionaux, nous revendiquons de bien connaître le fonctionnement des collectivités locales. Notre méthode ne vise pas à imposer un PLF et d'autres mesures sans avoir pris le pouls des collectivités en rencontrant leurs représentants. Il y a dans cette salle des élus avec lesquels j'ai travaillé pendant les vingt et un ans de mon mandat de maire de Beauvais et je crois pouvoir dire que nous parlons le même langage.

Concernant l'avancement du programme Action cœur de ville, 292 villes sont signataires d'une convention d'opération de revitalisation de territoire (ORT). L'Anah a subventionné la rénovation de près de 58 000 logements et la réhabilitation de 16 634 logements. Près d'une centaine de locaux d'activité économique ont été construits ou réhabilités par la Banque des territoires. Au 1er juillet 2022, sur les 5 milliards d'euros mis sur la table, 4,7 milliards ont été engagés par l'État et ses partenaires. D'ici décembre 2022, les 5 milliards auront été investis. Nous avons souhaité que le programme soit prolongé jusqu'en 2026, après accord du Président de la République et de M. Jean Castex, lors du dernier congrès de Villes de France. Nous finalisons la préparation du volet financier de la seconde phase que nous souhaitons la plus ambitieuse possible. J'ai réuni les financeurs, la semaine dernière, à Beauvau. En novembre, le Gouvernement présentera les priorités. Le programme Action cœur de ville comportera un important volet de transition écologique. Son périmètre sera étendu aux quartiers de gare et aux entrées de ville qui sont des lieux stratégiques pour renforcer l'attractivité des centres. En parlant des quartiers de gare, je pense aussi aux pôles multimodaux que des collectivités sont en train de mettre en place.

Dans certains territoires, le déploiement du programme Petites villes de demain, installé après le programme Action cœur de ville, a pris un peu de temps. Néanmoins, plus de 98 % de conventions d'adhésion sont signées dans plus de 1 600 Petites villes de demain et le programme prend une vitesse de croisière. Afin de tirer plus efficacement partie des quatre années restantes, j'ai renforcé cette action, d'une part, en faisant de Petites villes de demain un outil à disposition des maires pour accompagner la transition écologique de leur commune, et d'autre part en en renforçant le caractère opérationnel. Je souhaite que les effets du programme soient rapidement visibles pour les élus et les habitants.

Je reviendrai sur les nouvelles orientations en novembre mais, sur les 3 milliards d'euros annoncés au lancement du programme, 780 millions d'euros ont déjà été engagés, soit plus de 25 %. En ingénierie, sur les 250 millions d'euros annoncés, 75 millions d'euros ont été engagés et 876 chefs de projet Petite ville de demain, subventionnés par l'État et les partenaires, sont en place. En outre, 159 communes sur 507 sont engagées dans une ORT et plus de 22 000 logements ont été rénovés dans ces communes.

Depuis 1980, le principe en vigueur, plutôt protecteur, était la liaison des taux, afin de protéger les contribuables non électeurs et de limiter la pression fiscale. Mais peut-on offrir une plus grande marge de manœuvre aux élus face à une forte indexation des bases pour baisser le taux de manière flexible ? Il faut y réfléchir. Le dépôt d'amendements visant à réviser les zonages pour permettre aux communes touristiques et littorales de majorer la taxe d'habitation sur les résidences secondaires pourrait régler partiellement le problème.

Le montant de la DGF, annoncé par le comité des finances locales, le 26 septembre, s'élevait à 210 millions d'euros. Vendredi dernier, le Gouvernement a présenté un amendement pour le porter à 320 millions d'euros : 200 millions d'euros de dotation de solidarité rurale, 90 millions d'euros de dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et 30 millions d'euros de dotation d'intercommunalité, d'habitude financés par écrêtement de la DGF des autres communes. Cette première augmentation depuis 2013 sera financée par l'État. On peut toujours dire qu'elle n'est pas suffisante, mais moyennant ce taux, 95 % des communes verront leur DGF maintenue ou augmentée. Les 5 % de communes qui ne sont pas bénéficiaires sont celles qui ont perdu des habitants, se sont enrichies ou ont été exclues du dispositif pour diverses raisons.

La dotation d'aménagement des communes d'outre-mer (Dacom) augmente de 26 millions d'euros, dont 16 millions d'euros de rattrapage et 10 millions d'euros de progression automatique.

Je ne peux vous laisser dire que le pacte de confiance s'apparente au pacte de Cahors. Je me suis personnellement battue pour instaurer un système de confiance, contre un système de contrôle. Nous avons choisi de nous adresser aux collectivités par strates – régions, départements et communes – et, considérant que les collectivités ont le souci de gérer leurs dépenses de manière raisonnable, nous avons estimé qu'il n'était pas nécessaire de signer un contrat d'engagement, contrairement au dernier quinquennat. Nous garderons un œil sur les enveloppes globales. Si un département venait à déraper, nous nous entretiendrions avec les préfets pour rééquilibrer les dépenses. Nous présageons que les élus locaux seront responsables et qu'ils pourront gérer leur collectivité en conscience.

Pour tout vous dire, les collectivités qui n'avaient pas signé les contrats de Cahors avaient été au moins aussi raisonnables et vigilantes que celles qui les avaient signés. Partant de là, nous avons obtenu cet arbitrage de confiance avec les uns et les autres. C'est un outil favorable aux collectivités territoriales. Cette logique de confiance à l'échelle de la strate ne relève pas du contrôle individuel. C'est un bon compromis. Nous continuerons à travailler avec les associations d'élus, par exemple, sur les retraitements.

La mission des Maisons France services est portée avec le ministre M. Stanislas Guerini. Ce programme qui connaît un franc succès et qui atteindra son objectif à la fin de 2022 a créé un réseau de guichets mutualisés de services publics à proximité de tous les Français. De fait, 99 % des Français ont une Maison France services à moins de trente minutes de chez eux et 93 % à moins de vingt minutes. Ce dispositif est plébiscité. Nous avons reçu de nouvelles demandes d'installation dans différents territoires. Avec M. Stanislas Guerini, je suis à l'écoute des élus pour réfléchir à différentes possibilités. En novembre 2022, 175 Maisons France services seront labellisées. L'objectif du Président est donc d'ores et déjà atteint. Nous continuerons à donner à chaque Maison France services les 30 000 euros qui étaient versés en 2022 par l'État et les opérateurs. Si d'aventure des dysfonctionnements apparaissaient, nous examinerions la situation avec les préfets de département.

Concernant la décentralisation, nous avons longtemps partagé des compétences sans les clarifier, sans transférer la dynamique de financement ni la responsabilité. Le pouvoir normatif et les financements doivent les accompagner. Nos départements conduisent leur politique sociale sans disposer d'une véritable liberté normative ni percevoir les recettes qui y sont liées. Certains départements proposent de renationaliser le RSA. Deux expérimentations ont été acceptées, dans l'Ariège et en Seine-Saint-Denis. Des dispositifs devront peut-être être améliorés. Faut-il renationaliser le RSA ? Le sujet est sur la table.

La sécurité civile se construit au plus près des territoires. Nous pouvons bâtir une politique publique forte, cohérente et ayant du sens. Nous devons déterminer où la décision est prise le plus efficacement. Il faut approfondir l'application de la loi 3DS, qui offre des possibilités de différenciation et de décisions plus concrètes pour nos compatriotes. L'esprit du Conseil national de la refondation (CNR) vise à concevoir des solutions soutenues localement, car elles peuvent être différentes dans l'Oise, les Alpes-de-Haute-Provence ou l'ouest de la France. Il s'agit de donner aux élus les moyens d'établir des feuilles de route. Le Président de la République a annoncé en conseil des ministres la relance d'études sur la décentralisation. J'y travaillerai avec mes collègues.

Le ZAN vise un objectif ambitieux fixé par la loi « climat et résilience », celui de réduire l'artificialisation des sols. Il convient de concilier ce but avec les équilibres économiques locaux et sociaux propres à chaque territoire. Je souhaite, avec M. Christophe Béchu, non pas ralentir la procédure mais engager une concertation moins verticale, au niveau de chaque territoire. L'État et les collectivités doivent être partenaires de l'aménagement du territoire national. La sobriété foncière ne doit pas être antinomique du développement économique et de la construction de logements, car l'arrivée de nouveaux habitants peut garantir l'avenir d'une école et du territoire. Comme nous souhaitons continuer à aider les élus locaux à faire vivre leurs territoires et ne laisser personne dans une impasse, nous recourrons peut-être à la loi, mais nous maintenons la volonté d'un aménagement du territoire concerté et l'exigence de ne pas consommer trop de terres agricoles au profit du foncier en privilégiant le dispositif des friches, tant il est plus facile de reconstruire la ville sur la ville que de construire dans les territoires ruraux.

Toutefois, les collectivités doivent être accompagnées dans leurs démarches de sobriété foncière. Le Fonds vert mobilisera des crédits pour réhabiliter les friches, engager des actions de renaturation en ville ou de désartificialisation des terres, planter des arbres ou végétaliser, sans oublier la rénovation thermique des bâtiments publics, des écoles ou des mairies. Le Fonds vert mobilisera des outils d'ingénierie pour fournir les données nécessaires à l'accompagnement des collectivités. Je pense au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). Je rappelle, car ce n'est pas assez connu, que les communes de moins de 3 500 habitants peuvent faire appel gratuitement à l'ingénierie de l'ANCT. Le Cerema est très compétent et vos territoires doivent le saisir pour réaliser certains de leurs projets.

Nous voulons accompagner les programmes Action cœur de ville et Petites villes de demain par le Fonds vert. La place de la nature en ville sera au cœur de ces dispositifs. Sans que rien ne soit encore défini ni décidé, les premiers échanges tournent autour de la clarification de la nomenclature du plan ZAN, afin de permettre aux élus de développer des espaces naturels et de loisirs sans utiliser une partie de leurs droits à construire. Je pense bien évidemment aux 2 200 hectares du canal Seine-Nord Europe. S'agissant des efforts de renaturation que les élus devront consentir d'ici 2030, nous avons donné une instruction pour le mode de calcul des espaces naturels, agricoles et forestières (Enaf), qui introduit une logique de consommation nette afin de prendre en compte la renaturation.

Le Fonds vert a pour but d'accélérer la transition écologique dans les territoires. Ce fonds dédié dont le montant a été porté à 2 milliards d'euros est une première en matière de financement de la transition écologique. Les collectivités territoriales disposeront d'un outil adapté et fléché pour soutenir leurs projets. Il s'articule autour de trois axes. Le premier est celui de la performance environnementale pour encourager la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux, la valorisation des biodéchets, la modernisation de l'éclairage public. Le second tient à l'adaptation des territoires au changement climatique pour renaturer les villes, lutter contre les îlots de chaleur urbains et prévenir les risques naturels en métropole et en outre-mer. Quant au dernier, il se rapporte à l'amélioration du cadre de vie pour soutenir des projets de sobriété en matière de mobilités grâce à des parkings relais, au covoiturage et des prises de recharge électrique en ville, en matière foncière, des renouvellements de friches et la restructuration des locaux d'activité.

Ce fonds contribuera au financement du déploiement de la stratégie nationale pour la biodiversité dans les territoires, à hauteur de 150 millions d'euros. Son originalité résidera dans ses modalités de fonctionnement déconcentrées. Il s'adaptera aux besoins de chaque territoire dans une logique de souplesse et de fongibilité.

L'absence de visibilité pluriannuelle des crédits aux collectivités nous préoccupe. Notre agenda et notre cadre juridique contraints ne devraient pas évoluer, hélas. Même si les collectivités élaborent des programmes de fonctionnement pluriannuels, le budget de l'État est annuel. Nous pourrons cependant recourir à certains dispositifs qui nous permettront de donner plus de visibilité aux élus. À titre personnel, je pense que les contrats triennaux seraient bien plus adaptés mais ils ne sont actuellement pas envisageables, parce que le principe d'annualité budgétaire résultant de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) vise à protéger le pouvoir du Parlement en matière budgétaire. Néanmoins, cela ne s'oppose pas complètement à une programmation pluriannuelle de vos projets par le biais d'une loi de programmation ou de dispositifs contractualisés entre l'État et les collectivités locales, qui confèrent une certaine visibilité aux acteurs locaux.

Quant à la Collectivité européenne d'Alsace, le statut des régions ou des grandes régions n'est pas dans mon portefeuille. C'est une responsabilité du ministre de l'intérieur. Nous sommes loin du « big bang » territorial réclamé par les élus. Les présidents de région ont trouvé une certaine stabilité et il ne serait pas normal de ma part de me lancer dans ce genre de critique ou de vous donner l'espoir d'un quelconque projet.

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