Madame la ministre déléguée, j'en suis désolée, mais vos discours relèvent de l'enfumage.
La baisse du budget de cette mission est plus conséquente que ce que vous vous efforcez de dire : il diminue en effet de 13 % compte tenu de la suppression des dotations liées à la lutte contre la covid-19, et plus encore si l'on tient compte de l'inflation. Vous supprimez également des dotations qui avaient été créées pour compenser des pertes de recettes – la CVAE et les frais de gestion de la cotisation foncière des entreprises (CFE) – et vous baissez les impôts de production. Le compte n'y est donc pas.
De plus, les crédits sont inadaptés aux besoins. La petite hausse de la DTS est censée couvrir les frais importants de traitement du stock accumulé pendant la crise sanitaire ;or, la compensation de l'État était déjà très loin de couvrir les dépenses des communes pour gérer les DR. Toute votre politique de dématérialisation s'opère aux frais des collectivités et des usagers ! Le « tout dématérialisation » conduit également à la fin d'un service individualisé.
La question du partage de la charge liée à la dématérialisation se pose, d'ailleurs, y compris dans le cadre du montage financier des maisons France Services. Si l'État et ses services prennent à leur charge une partie des coûts, les collectivités en financent également une part significative, alors même que les services dus aux usagers ne relèvent pas de leur responsabilité. Ainsi la Défenseure des droits appelle-t-elle à nouveau les pouvoirs publics et l'État à compenser les charges supplémentaires des collectivités en raison de la dématérialisation des procédures administratives de l'État et des organismes sociaux. Nous demandons quant à nous la réouverture des guichets physiques.
Ce budget témoigne en fait de la fin de l'autonomie des collectivités. Un problème d'inégalité des dotations se pose, notamment à travers l'attribution des dotations de soutien par les préfets sur appel à projets. Seules les communes les mieux organisées et disposant de moyens techniques et humains suffisants peuvent en effet déposer une demande et obtenir cette dotation. Les préfets, de surcroît, disposent d'une trop grande marge d'appréciation, ce qui peut favoriser un certain arbitraire.
L'attente de la compensation, par l'État, de l'amputation des recettes liées à la taxe d'habitation, à la taxe foncière et à la CVAE, interdit aux collectivités d'avoir un contrôle réel sur les hausses ou les baisses de dotations, ce qui limite leurs stratégies de développement. La réalisation de leurs projets sera d'autant plus incertaine que ces suppressions sont pour la plupart compensées par la TVA et que cette ressource, comme l'ont noté certains économistes, risque de s'effriter.
Nous proposons, quant à nous, de faire de l'ensemble des territoires de notre pays des moteurs de la bifurcation écologique, tout en rétablissant l'égalité républicaine. Pour cela, il faut remettre les communes au centre de l'organisation territoriale et refaire des collectivités les cellules de base de notre démocratie en leur redonnant autonomie, pouvoirs de décision et moyens humains et financiers. Elles doivent avoir les moyens d'investir et disposer de dotations de fonctionnement stables, comme le demande par exemple l'Association des petites villes de France (APVF).
Pour cela, il faut revoir les critères de la DGF, qui pénalisent un certain nombre de communes. Il faut également cesser de baisser des dotations aux collectivités, de remplacer des dotations de l'État par des fonds d'investissement, mais aussi garantir un financement à la hauteur des missions transférées.
La question du désenclavement des territoires, notamment ruraux, est également essentielle. Nous devons reconstruire un maillage de réseaux de transports publics collectifs permettant à chacun de disposer d'une alternative locale à la voiture. Nous proposons notamment la création d'un commissariat de l'aménagement qui interviendra comme financeur, coordonnateur et conseiller technique dans les projets des collectivités.
Pour garantir l'égalité, il faut stopper la fermeture des services publics – postes, gares, hôpitaux, écoles, etc. –, les redéployer mais, surtout, réaffirmer le département comme l'échelon pertinent pour organiser un maillage équilibré des territoires. Enfin, il importe de doter ces derniers d'outils spécifiques pour assurer la planification écologique à partir de la stratégie de l'État, par exemple en instaurant un droit de préemption des communes sur les zones stratégiques des plans locaux d'urbanisme (PLU).
Nous ne voterons donc pas ces crédits.