Je me suis évidemment posé la question de cette omerta, cette loi du silence, qui, selon moi, remonte aux fondations mêmes du cinéma. Le cinéma, c'est l'image, et il faut peut-être donner une bonne image. Structurellement, dans les racines du cinéma, l'omerta est présente. La loi du silence est là : si tu parles, tu payes, tu es éjecté. C'est une réalité dont je suis la preuve vivante. Après vingt-huit ans de métier, mon téléphone a cessé de sonner instantanément. Le corps du cinéma, comme un organisme, réagit de manière organique dans son ensemble. Par mimétisme, même des personnes formidables qui n'ont rien à se reprocher me considèrent comme radioactif. On me dit que je suis infréquentable, dangereux, qu'il faut me débrancher, que je suis fou, etc. Je suis seul. Aucun syndicat ne m'a contacté, aucune association, à l'exception d'une seule, l'Association d'acteur.ices féministe et anti-raciste (ADA), que vous avez reçu par l'entremise d'Alice de Lencquesaing et d'une autre femme formidable, Luana Duchemin. Nous avons eu une réunion téléphonique à trois, où pour la première fois, on m'a demandé comment j'allais et on m'a soutenu. Depuis, nous échangeons régulièrement et nous allons nous rencontrer très bientôt. C'est la seule association avec laquelle j'ai pu dialoguer à ce jour.