On ne peut pas penser la souveraineté agricole sans intégrer la vulnérabilité qu'implique notre dépendance au phosphate marocain, au gaz russe, à certains engrais non carbonés, ou encore aux produits phytosanitaires, dont les principaux vendeurs sont chinois, américains ou allemands – et non français. En les remplaçant par de l'agriculture de précision, des produits de biocontrôle ou des NBT développés grâce à des technologies françaises, ou encore grâce à la rotation des cultures ou au stockage de CO2 dans les prairies, nous améliorerions à la fois notre résilience et notre souveraineté.
Ce constat, que je fais pour la France, vaut aussi très largement à l'échelle européenne. C'est pourquoi la deuxième étude d'impact de la Commission sur le règlement SUR, qui prenait en compte l'augmentation des prix liée au conflit en Ukraine, ainsi que la dépendance aux engrais et au gaz russe, conclut que le texte ne fait pas courir de risque à l'Europe en matière de souveraineté alimentaire ni de sécurité alimentaire. De fait, l'expérience a montré qu'à l'exception quelques cas marginaux, périphériques et conjoncturels, nous n'avons pas subi de pénuries alimentaires massives alors qu'on nous avait prédit le pire.
Sur ces questions, il importe d'objectiver le débat et de nous appuyer sur la science, en considérant les choses de manière dynamique, car il faudra laisser le temps aux acteurs de changer progressivement de modèle pour le rendre à la fois plus souverain et plus résilient.