Il n'a jamais été prévu, dans quelque version du texte que ce soit, de rendre 10 % des terres agricoles à l'état naturel, de les mettre en jachère ou de geler leur production. Je sais que le projet a été caricaturé comme tel et que cette version a été abondamment diffusée sur les réseaux sociaux, mais les législateurs européens n'ont jamais eu cette intention.
L'objectif était de faire en sorte que 10 % des surfaces agricoles utiles (SAU) puissent être comptabilisées comme éléments de paysage, jachères, zones de non-traitement (ZNT) ou bordures – la loi française interdit par exemple d'épandre des pesticides au bord d'une rivière, car ils se déverseraient immédiatement dans l'eau – pour permettre un meilleur équilibre des écosystèmes.
Prenons l'exemple des haies, que la France promeut depuis le plan lancé par Julien Denormandie avec le soutien de l'ensemble de la profession et financé par les plans de relance français et européen. Tout le monde est favorable à la plantation de haies : elles sont bonnes pour la biodiversité, constituent des ressources de biomasse et permettent de lutter contre l'érosion des sols. Or elles font bien partie des 10 % auxquels vous faites référence : elles se voient même appliquer un coefficient multiplicateur, puisque chaque mètre carré de haie planté compte pour 5 mètres carrés dans le décompte des éléments de paysage.
Les zones de non-traitement ont elles aussi été un sujet de débat pendant la crise agricole. Le Gouvernement a indiqué très clairement – et je m'en félicite – qu'il était hors de question de revenir sur le zonage en vigueur, qui interdit d'épandre des pesticides à côté des écoles ou des centres commerciaux. Toutes ces zones sont aussi intégrées dans les 10 %.
L'idée selon laquelle l'ambition initiale aurait été de rendre improductives 10 % des terres agricoles actuellement cultivées est donc tout simplement fausse, même si ce mensonge a été maintes fois répété. Je l'affirme devant vous sous serment.