Cet exemple illustre mes propos antérieurs. La surproduction témoigne des défauts d'une politique uniquement pensée comme productiviste. Il ne faut pas oublier que les quotas ont été mis en place non pas pour réguler, mais pour stopper une production qui finissait par ne plus trouver de débouchés. Ce processus devait s'arrêter là. En réalité, les quotas ne constituent pas un élément de régulation, mais un élément de plafonnement de la production. On a pu envisager de leur faire jouer un rôle régulateur en estimant que l'application de quotas à la production permettrait d'éviter la surproduction. Les quotas ont été supprimés quand il a été estimé que ce mécanisme ne permettrait pas de réguler le marché, selon une acception libérale qui considère que l'ajustement entre l'offre et la demande doit s'opérer à travers le marché.
J'ai réussi à obtenir de Phil Hogan une concession que la Commission ne voulait pas accorder initialement et qui prouve que la voix de la France compte. La crise laitière a été telle que des mécanismes de régulation ont été mis en place, sur le principe de l'intervention : en cas de crise, la Commission achète de la poudre de lait et la stocke. Ce mécanisme coûte cher et comporte un risque très dangereux : plus le stock est important, plus il pèse sur le marché. J'ai finalement réussi à le faire comprendre à la Commission et à lui suggérer de consacrer à la place un peu d'argent dans le financement de la baisse de la production chez les agriculteurs, plutôt que de racheter leur production à travers le dispositif de l'intervention.
Une telle démarche est intervenue sur la base d'un article qui avait été utilisé dans le cadre des IGP et des SIQO. J'estime que ce mécanisme de régulation est très important et, de fait, il a fonctionné. J'ai d'ailleurs reçu par la suite la « Vache d'or » de la part de l'EMB. En résumé, je revendique à la fois la régulation et le marché. Il faut aussi rappeler que la mise en place des quotas dans les années 1982-1983 correspondait à la fin du système du « Laissez-nous produire ». Si une nouvelle crise de surproduction devait intervenir au niveau européen, je serais favorable à une nouvelle utilisation du mécanisme que je viens de présenter plutôt que de conserver le principe de l'intervention, qui ne me semble pas approprié.