Ce travail a été effectué, de manière d'abord opérationnelle, avant d'être plus sémantique ou littéraire. Il n'y a pas de critique derrière cette expression. Je pense qu'il est important qu'à un moment donné, le vocabulaire soit stabilisé. La mise en place du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire s'est traduite rapidement par des mobilisations de groupes de travail sur les secteurs les plus dépendants. Nous avons fonctionné ainsi avec le plan de souveraineté autour des fruits et légumes, sur lequel les professionnels ont été mobilisés, mais aussi les chercheurs de l'INRAE. La question de l'élevage, sur laquelle nous pourrions revenir, montre un paradoxe. En effet, contrairement à ce que l'on pourrait penser, il n'y a pas de baisse de la consommation des produits animaux en Europe et en France, mais il y a une baisse de la production et une augmentation des importations. Nous avons travaillé sur ces sujets avec le ministère mais il n'y a pas eu, à ma connaissance, de définition précise de ce que l'on appelle « souveraineté alimentaire et agricole ». Si une telle définition existe, c'est une erreur de ma part de ne pas être capable de vous la restituer.
Cependant, la volonté politique de rendre ce sujet prioritaire est claire. Nous étions au sortir de la pandémie de covid, qui avait marqué tout le monde, avec les discours du Président de la République soulignant l'importance pour la France d'avoir une forme de garantie, une souveraineté sur les médicaments mais aussi sur l'alimentation. Cette intervention a marqué les esprits. Ensuite, la guerre en Ukraine a entraîné un second choc avec la baisse des exportations d'oléagineux et de céréales en provenance d'Ukraine et la hausse des prix des engrais qui a mis en danger l'alimentation du Proche-Orient et la sécurité alimentaire mondiale. À partir de ce moment, nous avons examiné de manière précise toutes les filières en dépendance. C'est ainsi que nous avons été mobilisés par le ministère, davantage que sur une définition complète de la notion.
Nous avons eu une discussion sur laquelle les chercheurs ont apporté des contributions, sans que l'on puisse dire qu'il s'agit de la définition de l'INRAE. L'Institut n'a pas adopté de définition mais nos chercheurs ont travaillé sur ce concept en observant son utilisation au niveau international. On note à ce propos les travaux de La Via Campesina, puis ceux de la FAO. Le Royaume-Uni s'est par ailleurs interrogé sur sa souveraineté alimentaire mise en difficulté moment du Brexit. En revanche, il n'existe pas à ma connaissance de définition complète et stabilisée de la notion de souveraineté alimentaire. C'est pourquoi je faisais référence à la loi à venir, qui vise à encadrer une définition. D'après ce que j'en ai vu, elle me semble assez équilibrée, dans la mesure où elle prend en compte la France, son approvisionnement alimentaire, sa sécurité au sein de l'Union européenne, avec une volonté de durabilité. Ce sont vraiment les messages importants que je voulais souligner.