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Intervention de Didier Le Gac

Réunion du mercredi 5 juin 2024 à 15h00
Commission d'enquête relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, à l'ensemble des conséquences de l'installation et des opérations du centre d'expérimentation du pacifique en polynésie française, à la reconnaissance, à la prise en charge et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ainsi qu'à la reconnaissance des dommages environnementaux et à leur réparation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Le Gac, président :

Notre ordre du jour appelle maintenant l'audition des trois premiers présidents du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen), qui se trouve au cœur de nos discussions depuis le début de notre commission. Tout d'abord, Mme Marie-Ève Aubin, présidente de section honoraire du Conseil d'État et première présidente du Civen, entre 2010 et 2015. Ensuite, M. Denis Prieur, conseiller d'État honoraire, président du Civen entre 2015 et 2017. Enfin, M. Alain Christnacht, également conseiller d'État honoraire, président du Civen entre 2017 et 2021.

Votre audition a pour but de nous permettre de mieux comprendre le fonctionnement du Civen au cours de ses dix premières années d'existence. Bien que vous ayez successivement occupé les mêmes fonctions, vous l'avez fait dans des conditions très différentes. Madame Aubin, à l'époque où vous étiez à la tête du Civen, celui-ci n'était pas encore une autorité administrative indépendante, et nous aimerions que vous reveniez sur le fonctionnement du Civen à cette époque, et sur les conditions d'exercice de sa mission auprès du ministre de la défense. Étiez-vous favorable à la transformation de cette structure en autorité administrative indépendante ? Quelles étaient, selon vous, les principales difficultés de son statut antérieur ? Nous souhaitons également comprendre comment il a été possible qu'entre 2010 et 2014, seules 17 victimes aient été indemnisées, alors que 830 dossiers ont reçu une réponse négative. Nous savons que la référence à un risque négligeable a été le point d'appui de nombreux rejets, mais ces chiffres sont vertigineux. Dès 2013, un rapport d'application du Sénat pointait l'échec de la loi relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, dite loi Morin, qui ne produisait pas les effets attendus. Selon vous, quelles sont les raisons de cet échec ?

Monsieur Prieur, vous avez vécu l'installation du Civen en tant qu'autorité administrative indépendante. Nous aimerions que vous nous expliquiez ce que cette transformation a changé du point de vue du fonctionnement de cette instance. Je souhaite que vous reveniez également sur un point précis évoqué par Sébastien Philippe et Thomas Statius dans leur célèbre livre Toxique : enquête sur les essais nucléaires français en Polynésie, et rappelée en audition la semaine dernière. Selon ces auteurs, le Civen a utilisé jusqu'en 2017 un logiciel américain pour évaluer le risque négligeable, sans disposer de l'ensemble des paramètres nécessaires à son bon fonctionnement. Pouvez-vous confirmer cette information ou, au contraire, la contester ?

Par ailleurs, lors d'une audition au Sénat le 22 juillet 2015, vous avez déclaré que la détermination de la probabilité de causalité constituait la pierre angulaire du dispositif. J'avoue avoir été quelque peu surpris par cette affirmation, car, à mes yeux, l'équilibre de la loi Morin repose non pas sur une probabilité de causalité, mais sur le principe d'une présomption de causalité qui, certes, n'est pas absolue, comme en témoigne la référence dans le droit actuel au seuil de 1 millisievert. J'aimerais que vous développiez ce point.

Monsieur Christnacht, vous avez l'expérience la plus récente du Civen, votre nomination étant quasi concomitante à la promulgation de la loi Égalité réelle outre-mer de 2017, dite loi Erom, laquelle a supprimé la référence au fameux risque négligeable. Vous avez été chargé de l'application du nouveau cadre législatif et réglementaire, et j'aimerais que vous partagiez votre analyse de l'introduction d'une référence au seuil d'exposition de 1 millisievert. Nous attendons également de vous un bilan de l'activité du Civen sous votre présidence, de nombreux observateurs estimant qu'il y a eu un avant et un après loi Erom. Le hasard a voulu que vous quittiez vos fonctions peu après la publication de Toxique : enquête sur les essais nucléaires français en Polynésie, et celle de l'expertise collective de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). J'aimerais connaître votre avis sur ces deux publications.

Enfin, j'aimerais vous demander à tous les trois comment vous expliquez que le nombre de dossiers déposés et acceptés soit si faible, alors que l'étude d'impact annexée à la loi Morin indiquait qu'au moins 30 000 personnes étaient susceptibles de développer une des pathologies non indemnisables au cours de leur vie ? Ce paradoxe demeure inexpliqué.

Avant de vous laisser la parole, je dois vous rappeler que l'article 6 de l'ordonnance de 17 novembre 1958, relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(Mme Marie-Ève Aubin, M. Denis Prieur et M. Alain Christnacht prêtent serment).

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