Les examens médicaux que nous subissions étaient pour le moins sommaires, et se bornaient à une spectrométrie gamma. Les rayonnements alpha et bêta, que j'ai évoqués précédemment, n'étaient absolument pas détectés et même très peu recherchés, du moins à ma connaissance. À ma connaissance, une seule personne a bénéficié d'un examen approfondi. Vous la connaissez bien, Monsieur le président, puisqu'il s'agit de mon ami Michel Cariou. Il lui a fallu quarante ans pour obtenir les véritables résultats de cet examen, qui a révélé une contamination au strontium 90 trois fois supérieure à la norme de l'époque, et treize fois supérieurs à la norme actuelle.
Je soutiens que nous avons tous été contaminés au strontium 90, alors qu'on voudrait nous faire croire que la contamination se limite au césium 137. Le césium 137 est un émetteur gamma, facilement mesurable. En revanche, pour mesurer la contamination aux rayonnements alpha et bêta, il est impératif de réaliser des analyses d'urine et de selles. Lors de mon premier passage au SMSR, en 1966, l'identification et la recherche des produits radioactifs étaient encore en phase d'expérimentation. Le corps médical, à cette époque, manquait de compétences, de moyens et de ressources humaines pour effectuer ces recherches.
De plus, le coût financier de ces examens pour tous les vétérans n'était pas négligeable. C'est aussi la raison pour laquelle très peu de vétérans militaires en ont bénéficié. À ce titre, je voudrais insister sur la différence notable qui existe entre les militaires et les civils du CEA. Nos régimes de surveillance étaient totalement distincts. Je peux en témoigner personnellement. Mon beau-frère faisait partie d'une équipe de décontamination du SMSR en première ligne. On lui a expliqué qu'il devait son sang à la patrie, tandis que les civils du CEA ont été rapatriés. Nous devions notre sang à la patrie, et à partir du moment où nous nous sommes engagés, tout était permis.