Lorsque l'on voyait son frère ou son cousin construire sa maison « en dur », représentation de la richesse extérieure et concept nouveau pour nous à l'époque, on avait envie de l'imiter. Avant l'implantation du CEP, les seuls emplois disponibles se trouvaient à Makatea, un atoll où se trouvait la mine d'extraction du phosphate. Il serait d'ailleurs sans doute utile d'inviter les anciens cette industrie, car ils en perçoivent encore des dividendes aujourd'hui. Les contraintes principales étaient, d'une part, le travail, et d'autre part, les études des enfants. J'ai moi-même découvert l'école à l'âge de onze ans. Je me sentais comme l'enfant du film « Un Indien dans la ville ». Aujourd'hui, je prépare un master en biologie.
Les études sur la santé sont multiples, mais les chercheurs ne sont jamais unanimes. Actuellement, nous nous efforçons d'identifier les véritables scientifiques, qui travaillent en toute sincérité, afin de collaborer avec eux. Vous en avez d'ailleurs entendu deux dans le cadre de cette commission, avec lesquels nous constituons une cohorte pour actualiser les travaux passés et mettre à jour nos méthodes grâce à l'évolution des techniques. Le problème tient au fait que peu de chercheurs sont véritablement honnêtes... Le débat doit donc être abordé scientifiquement, afin que les experts, dans leurs domaines respectifs, puissent proposer des solutions pour faire avancer le dossier de la santé en réunissant autour de la table toutes les parties prenantes, y compris ceux qui ont été affectés par le nucléaire. N'hésitons pas à comparer nos pratiques avec d'autres – les Américains ont des dossiers, ainsi que les Japonais, à propos des Hibakusha que le député Jean-Paul Lecoq connaît bien. Nous devons surtout fournir aux chercheurs les moyens nécessaires. De plus, il est impératif d'éviter les biais de sélection, sans retenir les individus qui n'ont pas été touchés par les nuages radioactifs, mais en prenant tous ceux qui ont été concernés.
Il est aussi nécessaire de repenser l'indemnisation, plutôt en tant qu'accompagnement. Nous devrions être pris en charge en France, au sein d'un centre d'accueil et d'hébergement comparable à une ambassade, avec un gouvernement et les lois de notre pays. C'est ainsi que nous pourrions procéder. Actuellement, nous devons nous débrouiller seuls. Nous individuellement, et la CPS également. Il faudrait par ailleurs augmenter le nombre de médecins au Civen, dont le fonctionnement ne doit pas être abandonné à des administrateurs et à des juristes, qui suivent souvent les directives sans discernement. Ainsi, aucune rencontre n'a eu lieu avec le Civen depuis plus de deux ans.