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Intervention de Bruno Chareyron

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 15h00
Commission d'enquête relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, à l'ensemble des conséquences de l'installation et des opérations du centre d'expérimentation du pacifique en polynésie française, à la reconnaissance, à la prise en charge et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ainsi qu'à la reconnaissance des dommages environnementaux et à leur réparation

Bruno Chareyron, conseiller scientifique de la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD) :

Les tirs de sécurité, comme leur nom l'indique, consistent à larguer une bombe atomique pour vérifier que la réaction nucléaire ne s'amorce pas. Il s'agit de s'assurer que l'explosion ne se produit que si on la déclenche. Ces tirs de sécurité ont donc consisté à faire chuter volontairement des bombes atomiques, notamment sur des sites comme Moruroa, à Colette par exemple. En tombant, l'engin se désagrège et libère du plutonium sous forme de grains de tailles variées. Or la présence de ce plutonium à la surface de Colette pose problème. L'étude de l'AIEA de 1996-1997, publiée en 1998, a d'ailleurs conclu que la France n'avait pas décontaminé le site au niveau annoncé, soit 1 million de becquerels par mètre carré, et que l'essentiel de la contamination en plutonium se trouvait dans le premier centimètre de sol. Ce plutonium est donc facilement mobilisable pour les personnes qui fréquenteraient le lieu.

En ce qui concerne votre deuxième question, la CRIIRAD ne dispose que de très peu d'informations précises sur la quantité de matière radioactive présente dans les 137 puits où ont explosé les bombes atomiques à Moruroa, ainsi que dans les 25 puits (auxquels deux autres s'ajoutent) où ont été enfouis des déchets radioactifs, et enfin dans les zones d'immersion au large de Moruroa. Nous n'avons accès, comme tout un chacun, qu'à quelques inventaires des quantités de substances radioactives publiés par le CEA et le ministère de la défense en 2006, mais nous ne sommes pas en mesure d'en garantir la fiabilité. Il est en revanche certain que les puits n'ont pas été conçus pour garantir le confinement à long terme des déchets radioactifs, qu'il s'agisse des puits où ont été déposés les déchets ou de ceux dans lesquels les armes atomiques ont explosé. Selon les informations transmises par le ministère de la défense, les transferts vers l'environnement sont actuellement limités. C'est peut-être vrai. Toutefois, n'y ayant pas accès, nous ne pouvons pas le vérifier. La question se pose à long terme, car la période de demi-vie du plutonium 239 est de 24 000 ans dans des zones qui, de surcroît, présentent une instabilité géomécanique. Cette situation n'est pas satisfaisante.

Lors de notre visite à Hao en 2005, qui a duré deux jours et demi, nous avons effectué quelques contrôles rapides. J'ai été profondément choqué par la quantité de gravats, de béton et de ferraille présents à l'époque, notamment près de la piste Vautour du côté de l'océan. J'espère que des améliorations ont été apportées depuis. Nous avons pu effectuer quelques fouilles à la pelle mécanique dans d'anciens locaux du CEA grâce à l'aide d'un vétéran polynésien qui avait travaillé à Hao et se souvenait approximativement de l'emplacement des différents bâtiments. Il a réalisé un croquis pour nous guider dans notre inspection, car nous manquions cruellement d'informations. Par conséquent, pour savoir s'il reste aujourd'hui des zones de contamination importante à Hao (cuves, tuyauteries enfouies, etc.), il serait nécessaire de disposer d'une série complète de documents (nature des installations, plans précis, évacuations des eaux usées, méthodes et niveaux de décontamination, etc.). Ces documents devraient être accessibles pour permettre des analyses critiques et des débats contradictoires avec le CEA et le ministère de la défense.

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