Comme vous l'avez rappelé, il est extrêmement difficile de lier une pathologie à une exposition aux radioéléments. C'est d'ailleurs une problématique que l'industrie du tabac a largement exploitée dès les années 1950. Bien que l'impact du tabac sur le cancer du poumon ait été prouvé, l'impossibilité de lier un cancer de ce type à la consommation de tabac était systématiquement affirmée et a longtemps perduré. Cette stratégie a empêché l'indemnisation des victimes pendant de nombreuses années. Mme Naomi Oreskes a d'ailleurs écrit un excellent livre sur le sujet, intitulé « Les marchands de doute ».
Nous devons donc réfléchir à votre proposition de suppression du seuil de 1 mSv. Dans la mesure où une population entière a été exposée, il existe en effet un risque populationnel – non réductible à une échelle individuelle – que nous devons parvenir à évaluer. Ensuite, il nous faut examiner la liste des maladies à prendre en compte. On peut par exemple supposer que la probabilité de développer un cancer de la thyroïde liée à une exposition spécifique est élevée.
Dans le rapport de la CRIIRAD, vous indiquez par ailleurs que des radionucléides ont été retrouvés dans les bandes de croissance des coraux du lagon de l'île de Mangareva, pour ceux qui ont des périodes plus longues. Je souhaite vous interroger sur le niveau de radioactivité actuel, les possibilités de bioaccumulation ainsi que leurs incidences potentielles aujourd'hui. En effet, certains radionucléides possédant des demi-vies très longues, ceux-ci sont susceptibles d'impacter les populations pendant une période prolongée. Ce risque est-il totalement inexistant ? Devons-nous seulement nous focaliser sur les radionucléides à courte durée de vie présents dans l'air au moment des essais ? Existe-t-il une possibilité de bioaccumulation ? Quel est le niveau de radioactivité mesuré parmi les poissons et les coraux ?