Je suis entièrement d'accord avec vous. La vie est née sous l'influence de nombreuses radiations. Nous avons observé les populations vivant dans le Kerala, une région de l'Inde où les niveaux de radiation naturelle atteignent de 10 à 60 mSv par an dans certains endroits. Ces populations ne développent pourtant pas plus de cancers que la moyenne, car elles sont habituées à ces conditions depuis longtemps. Les individus très sensibles, qui auraient pu apparaître au fil des recombinaisons génétiques, sont décédés avant de pouvoir se reproduire. L'effet des faibles doses de radiation ne constitue probablement pas un problème statistique en termes de nombre de cellules et de mutations. La question est de savoir si l'on porte ou non une susceptibilité génétique aux faibles doses. Nous connaissons désormais bien les gènes impliqués dans la réparation des lésions radio-induites, sachant que certaines mutations de ces gènes rendent les individus très sensibles au développement de cancers, même à faibles doses. En Polynésie française, ce type de sélection ne peut s'opérer en raison de la faible irradiation naturelle.
Connaissant la Polynésie, où j'ai vécu au total 48 mois et dont j'ai visité toutes les îles habitées, je pensais que, compte tenu du métissage existant, la population serait très peu différente. Cependant, les données génétiques dont nous disposons maintenant révèlent une structuration génétique très particulière, caractérisée par de nombreuses combinaisons inexistantes ailleurs, qui peut conduire à une radiosensibilité plus élevée. Naturellement, cet aspect diminuera progressivement avec les métissages, mais cela prendra encore beaucoup de temps, probablement plusieurs centaines d'années avant de disparaître complètement.