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Intervention de Florent de Vathaire

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 15h00
Commission d'enquête relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, à l'ensemble des conséquences de l'installation et des opérations du centre d'expérimentation du pacifique en polynésie française, à la reconnaissance, à la prise en charge et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ainsi qu'à la reconnaissance des dommages environnementaux et à leur réparation

Florent de Vathaire, directeur de recherche de première classe de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), premier signataire de l'expertise collective de l'INSERM « Essais nucléaires et santé :

Tous les quatre à cinq ans, un espoir émerge quant à la découverte d'un biomarqueur pour les cancers radio-induits, mais il s'évanouit rapidement. Malgré de nombreuses publications dans des revues comme Science ou celle de l'Académie nationale des sciences aux États-Unis, à ce jour aucun marqueur ne permet de déterminer si un cancer quel qu'il soit est radio-induit. Actuellement, quelques espoirs reposent sur les miRNA (ou micro-ARN) dont on a entendu parler dans le contexte du covid. D'autres espoirs reposent sur l'épigénétique, mais ils concernent davantage les biomarqueurs d'exposition, indépendamment de la présence d'une pathologie. Jusqu'à présent, aucune avancée concrète n'a été réalisée. Par conséquent, nous nous appuyons toujours sur d'anciennes méthodes applicables à des doses supérieures à 100 mSv et qui ne sont pas pertinentes en l'espèce.

S'agissant du millisievert, la formulation précédente de la loi Morin sur le risque négligeable était inappropriée. Un risque négligeable n'a pas la même signification pour une personne recevant une radiothérapie, qui sera sauvée grâce à ce traitement et pour qui le risque de développer un cancer secondaire est négligeable, pour un petit groupe de personnes ou pour des travailleurs, que pour à la population générale. Il aurait fallu préciser quelle catégorie de la population était concernée. J'étais pour ma part favorable à la première version de la loi Morin, qui proposait de se limiter à une certaine zone géographique, modifiée avec les nouvelles connaissances acquises en 2013. J'étais également d'accord pour y inclure les travailleurs polynésiens. La limite d'1 mSv me semble être une erreur car elle étend le problème de manière excessive. Je pense que 90 % de la population polynésienne a été exposée à une dose de radiation due aux essais nucléaires. Il s'agit toutefois d'une dose extrêmement faible, sans effet notable, qui met sur un pied d'égalité les habitants de Tureia, qui ont reçu une dose significative, avec toute personne non irradiée. Pour rappel, un simple scanner médical délivre une dose bien supérieure et la dose moyenne reçue par les enfants aux États-Unis lors d'examens médicaux est aussi plus importante. Si cette exposition avait un effet notable, nous l'aurions constaté. En conséquence, le seuil d'1 mSv ne me paraît pas adapté compte tenu des connaissances actuelles, qui reposent néanmoins sur des études menées sur des populations européennes, japonaises et russes. Reste donc la question de l'extrapolation de ces données – collectées au sujet de populations européennes, américaines ou russes – aux populations polynésiennes, qui présentent des particularités génétiques. En effet, celles-ci se sont développées à partir d'un petit nombre d'individus et malgré les nombreux métissages depuis 200 ans, elles conservent des combinaisons génétiques uniques. Même en y incluant les métis et les non-Polynésiens, cette population reste génétiquement distincte.

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