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Intervention de Gautier Arnaud Melchiorre

Réunion du mardi 4 juin 2024 à 16h30
Commission d'enquête sur les manquements des politiques de protection de l'enfance

Gautier Arnaud Melchiorre, auteur du rapport « À (h)auteur d'enfants » :

Je pense par exemple au réseau La Bonde, qui déploie trois lieux de vie peu éloignés, ce qui ressemble à un accueil de Mecs déguisé. Il importe donc d'accorder une attention particulière aux lieux de vie, sans pour autant établir un cadre complètement restrictif qui viendrait éroder les belles initiatives qui peuvent voir le jour. Deux lieux de vie m'ont particulièrement plu : la maison des lézards à Nîmes et un lieu de vie près d'Angers, une maison accueillant des enfants souffrant de troubles du neuro-développement. Dans cette maison, il existe par exemple dans le jardin un petit espace carré dans lequel les enfants peuvent exprimer leur colère et dire des gros mots.

Par ailleurs, il n'existe pas vraiment de grandes disparités entre territoires lorsque l'on s'intéresse à la vie de l'enfant dans son quotidien. Les Mecs de Caen et d'Avignon sont confrontées aux mêmes difficultés dans le quotidien de l'enfant. En revanche, j'ai pu observer de grandes disparités dans le cadre de la sortie des dispositifs de l'ASE. Certains territoires investissent ainsi sur ses sorties, quand d'autres n'y prêtent pas vraiment attention. Les disparités sont aussi intra-territoriales, au sein d'un même département. Par exemple, les enfants ont souvent indiqué que lorsqu'ils étaient accueillis dans une petite maison, ils se sentaient mieux. Je rappelle que certains établissements accueillent par exemple plus de 100 enfants. Dans ce cadre, l'écran associatif pourrait sans doute jouer un rôle utile. En effet, le référent ASE est là pour veiller au projet de l'enfant, et non pour représenter le département en tant qu'employeur. Lorsque l'écran associatif existe, il permet à une association spécialisée d'accompagner les familles d'accueil et, partant, de bien distinguer les rôles.

En revanche, j'ai été frappé par le fait que certaines familles d'accueil sont spécialisées dans l'accueil d'urgence, en comparaison avec des familles « classiques ». J'ai interrogé les familles d'accueil spécialisées, qui m'ont indiqué que leur rôle consiste à observer l'enfant et à formuler des recommandations sur le meilleur accueil possible. Mais les délais administratifs et les méandres de la vie étant ce qu'ils sont, un enfant peut rester plus d'un an dans une famille d'accueil d'urgence, avant qu'il n'aille dans une autre famille d'accueil. Dans ces circonstances, comment s'étonner ensuite que l'enfant finisse par « exploser » et ne plus accorder sa confiance ? En résumé, plus les rôles sont spécialisés, plus la situation peut être compliquée.

Dans le rapport, au sujet de l'accueil et de son inconditionnalité, je me demande si l'enfant doit être celui qui, dans son quotidien, porte la responsabilité du dysfonctionnement de l'organisation. Les grands établissements d'urgence ne dysfonctionnent pas tous. Des enfants peuvent s'y sentir bien, mais on leur a indiqué qu'ils ne pourraient pas y rester, car il s'agit d'une solution supposément temporaire. De fait, il est frappant de voir que dans les établissements d'urgence, les chambres d'adolescents ne sont pas décorées, dans la mesure où ils attendent qu'on leur dise où ils iront finalement. Mais comme il n'existe pas de place ailleurs, les adolescents ne partent pas et s'attachent aux éducateurs. Ceux-ci sont placés en porte-à-faux car ils savent que ces enfants peuvent partir du jour au lendemain si une place devait finalement se libérer ailleurs. À un moment donné, il faudrait permettre à l'enfant d'exercer un recours, en tant que sujet de droit. S'il se sent bien quelque part, ce n'est pas à lui, mais à l'administration de s'adapter.

Enfin, je ne peux que vous inviter à établir un droit de visite, dans la mesure où la représentation nationale doit aller à la rencontre des enfants, que vous pouvez par ailleurs inviter à l'Assemblée nationale.

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