Nous sommes réunis pour examiner l'action du gouvernement en matière de gestion des finances publiques pour l'année 2023, avec un accent particulier sur la lutte contre l'évasion fiscale. Cet exercice s'avère extrêmement complexe, car nous manquons de données et de chiffres pertinents pour évaluer cette action. Comme l'année précédente, les services de la DGFiP nous renvoient aux données du document de politique transversale annexé au projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Cependant, ces données s'arrêtent au 31 décembre 2022. Dans ces conditions, comment pouvons-nous débattre de l'exécution budgétaire de 2023 ? De plus, malgré les recommandations répétées dans mes rapports spéciaux consacrés à la lutte contre l'évasion fiscale annexés aux PLF 2023 et 2024, il n'existe toujours aucun document permettant de disposer de données sur les crédits consommés en 2023 pour la lutte contre l'évasion ou la fraude fiscale. Seule une évaluation des crédits consommés en 2023 pour l'activité de contrôle fiscal a été fournie. L'enjeu est considérable : sans une définition rigoureuse du périmètre de la lutte contre l'évasion fiscale, comment pouvons-nous comparer l'évolution de cette politique publique d'année en année ? Je sais, monsieur le ministre, vous allez me renvoyer à ce fameux document de politique transversale (DPT), mais comme je l'ai déjà expliqué, les éléments figurant dans ce document sont incomplets et imparfaits. Cela nous oblige chaque année à solliciter les services de la DGFiP pour obtenir des éléments complémentaires en matière de rendement des contrôles. Les réponses sont souvent partielles, si bien que la représentation nationale n'a jamais une vision exhaustive de la situation. Cela pose un sérieux problème pour nous, parlementaires, dans notre rôle de contrôle de votre action.
Que pouvons-nous dire avec le peu de données à notre disposition ? Deux éléments tout de même. Premièrement, les résultats du contrôle fiscal que vous présentez comme historiques, soit 15,2 milliards d'euros, représentent une hausse de seulement 600 millions par rapport à 2022. C'est une augmentation marginale, voire une baisse en volume si l'on prend en compte l'inflation sur la période. Ensuite, récupérer 15 milliards sur la centaine qui échappe chaque année aux caisses de l'État ne peut être considéré comme une réussite.
Sur les effectifs du contrôle fiscal, le bilan est, selon moi, catastrophique. En effet, nous sommes passés de 12 189 équivalents temps plein (ETP) en 2016 à moins de 10 294 en 2022. Une augmentation de 1 500 ETP pour la lutte contre la fraude fiscale est annoncée à l'horizon 2027, avec des effectifs supplémentaires prévus pour 2023 et 2024. Vous l'avez mentionné. Cependant, la Cour des comptes souligne une sous-consommation du plafond d'emplois en raison d'une mauvaise anticipation des départs. Les augmentations d'effectifs ont-elles été réalisées ? Quels services sont concernés et quelles sont les prévisions pour les années à venir ?
Je souhaite également vous interroger sur la manière dont vous collaborez avec les parlementaires sur ce sujet. Le Conseil d'évaluation des fraudes ne compte parmi ses membres que les présidents des commissions des finances, alors que certains d'entre nous sont très engagés au Sénat ou à l'Assemblée nationale sur cette question. De plus, lors des réunions que vous organisez dans le cadre des travaux ministériels, comme le plan fraude ou d'éventuels projets de loi sur la fraude, certains groupes politiques sont invités tandis que d'autres ne le sont pas. J'aimerais obtenir des éclaircissements sur vos méthodes de travail et les raisons de ces choix.