Dès lors que l'on est exportateur des produits concernés, le risque que vous mentionnez n'existe pas. Or la France est un grand pays céréalier et l'un des acteurs majeurs sur ce marché à l'échelle européenne et mondiale.
De façon plus globale, votre question concerne la manière de se prémunir contre les pays détournant les règles du jeu économique à leur avantage. Se mettre totalement à l'abri des fluctuations de prix supposerait de définir des prix garantis au sein de l'espace européen, ce qui aurait pour conséquence un blocage des exportations vers l'extérieur de l'Europe et une incapacité à écouler les stocks. L'objectif est donc plutôt de limiter notre dépendance vis-à-vis de la Russie et de développer une stratégie de coalition avec le continent américain par exemple, afin de remettre les mauvais joueurs sur le droit chemin. Il faut coopérer avec des pays qui n'ont pas envie de prendre le risque d'une crise alimentaire. Nous ne pouvons nous priver d'aller sur les marchés mondiaux, d'une part pour des raisons d'équilibre économique de nos filières, d'autre part pour des motifs géopolitiques. Il n'est pas antinomique à mes yeux de développer à la fois une stratégie européenne et une stratégie mondiale.
La fluctuation des prix est un tout autre sujet. S'extraire du marché n'est pas une solution satisfaisante car cela fait courir le risque de devenir une puissance mineure et de disparaître. Dans les années 1920 a été inventé aux États-Unis un système de régulation non des prix, mais des revenus des agriculteurs. Cette piste me semble intéressante à creuser afin d'éviter une déstabilisation de l'appareil de production.