Je trouve en effet cette situation problématique : la France pourrait, dans bien des domaines, mieux gérer la compétition avec ses voisins européens. Notre pays dispose en effet de vastes surfaces agricoles, d'une technicité unanimement reconnue, de formations de qualité et d'une recherche de haut niveau. Sans viser l'autarcie, le fait de ne pas être en mesure de satisfaire nos besoins dans certaines filières mérite d'être questionné. Ne pas considérer cela comme un problème pourrait conduire progressivement à perdre la volonté de souveraineté qui nous anime vis-à-vis de nos collègues et partenaires européens. Nous avons besoin, sur un certain nombre de sujets, de retrouver de la compétitivité et un niveau de production satisfaisant.
Nous devons également savoir gérer nos interdépendances et nos coopérations à l'échelle européenne afin de pallier les chocs induits par le dérèglement climatique. Il est par exemple heureux que la France ait pu pourvoir en 2023 aux besoins européens en matière de production de céréales et éviter ainsi le recours à des importations en provenance de pays tiers.
Il convient en résumé de renforcer la compétitivité nationale sans s'abstraire totalement d'une logique d'interdépendance et de coopération à l'échelle européenne, nécessaire pour faire face ensemble aux conséquences néfastes du changement climatique.
Des distorsions de concurrence sont en outre apparues progressivement au niveau français et ont pu entraver certaines capacités de production. On pense par exemple à la question de l'usage des produits phytosanitaires et aux lourdeurs administratives auxquelles sont soumis les agriculteurs.
Je pense enfin que l'agriculture française a perdu le caractère offensif dont elle avait fait preuve dans les années 1960 et 1970 pour conquérir des marchés voisins. Les agricultures espagnole et italienne se concentrent par exemple en premier lieu sur l'espace européen. La stratégie française s'est trop polarisée sur quelques filières, comme les vins et spiritueux, dont la croissance des exportations s'effectuait essentiellement hors des frontières européennes. Elle n'a pas accordé assez d'importance à des filières susceptibles de se développer au niveau européen. Cet élément devra être travaillé, en mettant l'accent sur la valorisation de la marque France.