Bien qu'ayant grandi et vécu quarante-cinq ans en Polynésie, je ne me considère pas comme pleinement polynésien dans le sens où je pense être chez eux et non chez moi. Cependant, si j'étais polynésien, je serais forcément écologiste. Je ne comprends pas pourquoi le parti écologiste n'a jamais réussi à se développer ici. En réalité, nous sommes tous écologistes, mais nous ne sommes pas nécessairement affiliés à un parti écologiste plutôt qu'à un autre. Les discours sur la terre et le lagon devraient obligatoirement aboutir à un engagement écologiste. En revanche, l'idée d'une conscience planétaire nous incitant à manifester pour l'écologie ou contre le nucléaire à l'échelle mondiale est complexe pour les Polynésiens, qui nourrissent des solidarités et des préoccupations locales plutôt que planétaires. La majorité considère qu'il faut d'abord s'occuper de ce qui se passe dans son propre pays. Par ailleurs, les associations qui pourraient pallier les manques de l'éducation nationale et territoriale font l'objet de jeux de pouvoir. Ainsi, certaines peuvent être accusées d'être manipulées par les indépendantistes et se voir, par exemple, refuser le prêt d'une salle pour leurs réunions. Il existe certes un consensus parmi les Polynésiens pour reconnaître que chacun est victime du nucléaire et aurait intérêt à demander un dédommagement en nature. Cependant, la culture du bipartisme, marquée par le clivage entre indépendantistes et non-indépendantistes, freine certaines évolutions. Les Polynésiens sont profondément chrétiens et se considèrent comme pacifiques. Globalement, on recense très peu de violences politiques dans ce pays malgré son histoire coloniale et la période des essais nucléaires, qui n'ont pas donné lieu à des soulèvement de populations.