En vous écoutant, je pense à cette formule de Corneille : « Je suis jeune, il est vrai, mais aux âmes bien nées la valeur n'attend pas le nombre des années. » Votre sagesse, tout à fait remarquable, nous ramène à notre condition et nous aide à comprendre les problèmes que vous rencontrez.
Vous appelez au dépassement de la dimension purement financière, indemnitaire, du préjudice subi. Quel aspect voulez-vous mettre en avant ? Un préjudice peut être moral, physique ou matériel. Si j'ai bien compris, vous évoquez notamment la dimension post-générationnelle de votre travail, qui concerne aussi les générations futures. Or, comme nous l'avons déjà vu lors d'une audition précédente, toute la difficulté réside dans l'établissement d'un lien de causalité entre la faute éventuellement commise, d'une façon ou d'une autre, et le préjudice subi. Du reste, vous abordez le sujet de l'indemnisation d'une manière qui me semble un peu moins précise.
Nous avons compris que votre association assurait un accompagnement technique, juridique – vous avez parlé de votre collaboration avec un avocat – et psychologique, et que votre action se heurtait à certains freins. Combien de victimes accompagnez-vous ? Certains dossiers ont-ils déjà abouti, d'une façon ou d'une autre ?
Vous défendez la subjectivité des études épidémiologiques. À cet égard, j'ai cru comprendre que vous appeliez à la collaboration entre scientifiques autochtones et provenant d'autres pays. Pensez-vous vraiment que c'est l'origine des scientifiques participant à ces études – locaux, de métropole ou même étrangers –, indépendamment de leur compétence, qui résoudra le problème de l'objectivité des travaux ? Ne faudrait-il pas envisager plutôt une limitation du périmètre de ces études ? J'ai plusieurs fois entendu certains de nos interlocuteurs regretter le flou ou le caractère limité des comptes rendus de travaux scientifiques. Ne devrions-nous pas conclure à la nécessité d'une définition plus stricte du périmètre des études épidémiologiques ?
Les générations passent. Alors que les plus anciens disparaissent, la mémoire collective tend à s'effacer, à moins d'être entretenue par différents vecteurs. Portez-vous une attention particulière à la flore et la faune ? Les temps longs que connaissent les atolls en matière de transformation de la terre et de construction des massifs coralliens peuvent représenter pour vous un argument supplémentaire. Si la parole n'est plus transmise, si plus personne ne témoigne, ne pouvez-vous pas mobiliser d'autres éléments afin de rappeler à la population, avec un effet rétroactif, l'origine des problèmes que vous traitez ?