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Intervention de Dominique Laurier

Réunion du jeudi 23 mai 2024 à 9h00
Commission d'enquête relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, à l'ensemble des conséquences de l'installation et des opérations du centre d'expérimentation du pacifique en polynésie française, à la reconnaissance, à la prise en charge et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ainsi qu'à la reconnaissance des dommages environnementaux et à leur réparation

Dominique Laurier, adjoint au directeur de la santé de l'IRSN :

J'ai dit que nous n'avions pas d'activités dans le domaine de la santé en Polynésie, mais ce n'est pas tout à fait vrai. Nous avons été sollicités par la direction générale de la santé (DGS) en 2017 pour donner notre avis sur la classification des cancers radio-induits réalisée par l'Unscear, par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) et par des pays comme les États-Unis ou le Royaume-Uni. Nous nous attendons à une saisine prochaine de la DGS sur ce même sujet.

Nous ne faisons pas de recommandations particulières pour la Polynésie, car nos recommandations s'appuient sur l'état des connaissances concernant la relation entre l'exposition aux rayonnements ionisants et les risques pour une population donnée. Nous proposons des synthèses au niveau national ou international valables pour différentes situations d'exposition. Nos recommandations s'appliquent globalement et ne sont donc pas spécifiques à la Polynésie.

À l'occasion de la mise à jour des connaissances sur les cancers radio-induits, notamment dans le cadre de groupes de travail au sein de l'Unscear, de nombreux avis divergents s'expriment et il peut se passer plusieurs années avant qu'un rapport ne soit publié. Nous discutions il y a encore deux jours à l'Unscear et les débats étaient très chauds, notamment sur l'interprétation des résultats pour les faibles doses. La position de l'IRSN est qu'il existe un risque dans ces cas, mais tout le monde n'est pas d'accord. Notre position est basée sur la science, mais le consensus est toujours en discussion.

Concernant les effets sur la descendance, nous avons réalisé une synthèse de la littérature qui a fait l'objet de deux publications il y a deux mois. Nous avons recensé 140 publications scientifiques. Il est acquis que l'exposition in utero, c'est-à-dire une exposition de la mère pendant la grossesse, augmente – en fonction des doses – les risques de cancer, de certaines pathologies et de malformations congénitales. En revanche, pour les effets héréditaires, liés à des expositions avant la conception jouant sur les cellules germinales transmises aux générations suivantes, nous avons beaucoup plus de mal à détecter les risques. Jusque dans les années 1970, les tests étaient réalisés sur des drosophiles et ils indiquaient une modification des caractéristiques des descendants dont les parents avaient été exposés à de fortes doses. Des résultats similaires ont été obtenus depuis avec des souris, qui sont beaucoup plus proches des humains. Nous constatons des modifications génétiques dans la descendance alors qu'elles ne sont pas présentes chez les parents.

Cette synthèse, réalisée dans le cadre international de la CIPR et de plateformes européennes de recherche, conclut que nous ne sommes pas capables de démontrer chez l'homme des transmissions génétiques et une augmentation des risques de cancer ou de malformations à la naissance. Les études concernant les humains sont très limitées et beaucoup plus difficiles à interpréter que celles dont nous disposons sur le cancer. C'est pourquoi nous restons très prudents sur l'effet héréditaire chez l'homme et avançons des hypothèses pouvant expliquer pourquoi ces effets sont démontrables chez l'animal mais pas chez l'homme.

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