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Intervention de Dominique Laurier

Réunion du jeudi 23 mai 2024 à 9h00
Commission d'enquête relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, à l'ensemble des conséquences de l'installation et des opérations du centre d'expérimentation du pacifique en polynésie française, à la reconnaissance, à la prise en charge et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, ainsi qu'à la reconnaissance des dommages environnementaux et à leur réparation

Dominique Laurier, adjoint au directeur de la santé de l'IRSN :

Pour ce qu'on sait des effets radio-induits, l'IRSN a trois types d'activité.

La première, c'est la recherche : nous menons des travaux de biologie et de radiotoxicologie, sur l'animal mais aussi, par des études épidémiologiques, sur l'homme, par exemple sur des enfants qui passent des scanners, sur les travailleurs de l'industrie nucléaire ou les personnels navigants des compagnies aériennes. Nous essayons ainsi d'en savoir davantage sur les effets des rayonnements ionisants.

Notre deuxième activité est de synthétiser les connaissances : les questions sur les effets des faibles doses sont nombreuses. Nous avons ainsi réalisé récemment un rapport dans le cadre du plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) sur la question des sites de stockage, où la question des faibles doses se pose de la même façon.

Notre troisième activité est de contribuer à la synthèse internationale, aux travaux des Nations unies, donc à l'Unscear et à la Commission internationale de protection radiologique.

Nous disposons donc d'une assez bonne connaissance des effets des rayonnements ionisants à faible dose. Mais nous n'agissons pas sur les systèmes de compensation. Du reste, les deux systèmes que vous évoquez – celui des travailleurs du nucléaire et celui qui s'applique en Polynésie – sont très différents et, pour les travailleurs, la liste des pathologies concernées est très limitée.

Ce qu'on peut dire aujourd'hui sur les effets des rayonnements ionisants et le risque de cancer, c'est que, parce que nous n'avons pas d'observation, nous ne pouvons pas affirmer qu'il existe un risque à très faible dose. Nos niveaux de connaissance concernent des niveaux d'exposition à quelques dizaines ou quelques centaines de millisieverts : on peut aujourd'hui démontrer une augmentation du risque de certains cancers à des niveaux d'exposition de l'ordre de 100 millisieverts. En dessous, le système de radioprotection suppose, dans l'état actuel des connaissances, que ce risque est continu et que des doses plus faibles entraînent elles aussi une augmentation du risque – c'est-à-dire une augmentation de la probabilité de cancer. Les rayonnements ionisants ne sont qu'un seul des nombreux facteurs de risque de cancer connus ; si les doses sont faibles, la contribution des rayonnements ionisants au risque est faible, et cela rend difficile d'identifier leur contribution au risque de cancer, de la quantifier et de la prendre en compte dans des systèmes de compensation.

Quel que soit le système, les seuils retenus – la limite à 1 millisievert pour être éligible au système de compensation actuelle par le Civen, par exemple – sont des décisions de gestion, pas des limites de risque. Je le redis, nos connaissances ne nous permettent pas d'identifier un seuil en deçà duquel le risque serait nul : on considère que le risque est progressif, même si on ne peut pas l'observer dans des études épidémiologiques pour des doses sont très faibles. On ne peut pas aujourd'hui confirmer ce fait, on suppose que c'est le cas ; nos observations s'arrêtent à quelques dizaines ou centaines de millisieverts, pour les expositions professionnelles comme pour les expositions en Polynésie.

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