Je vous remercie, monsieur le rapporteur, pour ce rapport manifestement élogieux quant au bien-fondé du dispositif et au fait qu'il ait trouvé un public.
Votre analyse me semble toutefois comporter un biais. Vous comparez parfois les pourcentages d'aides accordées à des tranches de communes parfois avec le nombre de communes au sein du total des communes et parfois avec la population. Il se trouve que l'écart est nettement moindre en se référant à la population. Vous indiquez qu'environ 40 % des bénéficiaires se situeraient entre 1 000 et 10 000 habitants, soit environ 36 % de la population. Sur les très petites communes, dont vous indiquez qu'elles représentent 15 % du pays, il convient de tenir compte de leur densité. Nous avons attribué les crédits aux départements selon leur population et toujours dans un souci d'équité.
Pourquoi la déconcentration ? Pour tenir compte du principe de libre administration des collectivités territoriales et du fait que la Nation présente des disparités dont nous avons conscience. En Corse, la priorité est la stratégie nationale sur la biodiversité et la préservation de la nature. Dans les Hauts-de-France, c'est la dépollution des friches. La seule constante de l'ensemble du territoire est le besoin en rénovation thermique des bâtiments, soit 38 % de l'enveloppe globale.
J'en viens à la question de la rénovation de l'éclairage public, dont j'assume pleinement que nous l'ayons inclus dans le dispositif. La raison en est simple.
Sur les 30 millions de points lumineux et les 10 millions de candélabres actuellement identifiés sur notre réseau, seulement 15 % sont équipés en LED. Nous savons pourtant que le passage du thermique aux LED nous permettrait d'engranger une économie globale de 60 %.
En tant que responsable d'une communauté urbaine, j'ai supervisé le remplacement intégral de lampadaires vers une solution thermique, ce qui nous a permis de réaliser 2 millions d'euros d'économies annuelles, avec un retour sur investissement, à l'échelle de la communauté urbaine, qui est atteignable au prix actuel de l'électricité.
Une démarche de cette nature s'avère économiquement équilibrée, contrairement à certaines aides qui ne permettent pas un retour sur investissement. Je pense aux trames noires qui contribuent à la préservation de la biodiversité, aux opérations de déminéralisation qui améliorent le confort et l'adaptation des espaces. Lorsqu'un équilibre économique est possible, il est souhaitable de le poursuivre, en réfléchissant notamment à la dette verte et à la manière de comptabiliser différemment les dépenses d'investissement afin d'éviter des dépenses de fonctionnement ultérieures.
Votre rapport contient des éléments précieux en termes de retours d'expérience, sur les agents dédiés et la fluidité des interactions lorsque les syndicats mixtes ou les départements coopèrent. Vous avez raison de souligner que, dans le cadre du Fonds vert, la qualité des coopérations intercommunales et le rôle que les institutions supra-communales acceptent de jouer sont essentiels pour impulser des projets.
Par exemple, certains départements ont investi dans l'achat de drones pour lutter contre les feux de forêt, en utilisant des crédits du Fonds vert pour acquérir des caméras thermiques et renforcer leurs capacités d'extinction d'incendies, parfois en collaboration avec des communes au titre de la Défense des forêts contre les incendies (DFCI). Ce type de stratégies territoriales me semble être de bonne pratique et à encourager à l'avenir.
Par ailleurs, l'idée d'une sous-consommation par les quartiers prioritaires de la politique de la ville est à nuancer pour deux raisons. Tout d'abord, le temps de montage et de validation des dossiers est assez long dans de nombreuses régions de France. Il est évident que la priorité soit accordée aux projets déjà en cours. Dans de nombreux quartiers prioritaires de la politiques de la ville, les projets en cours bénéficient de financements dédiés : dotation politique de la ville (DPV), dotation de péréquation urbaine (DPU) ou financements de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).
Dans la ville où je suis adjoint, par exemple, nous n'avons pas bénéficié du Fond verts, car nous disposons de 500 millions d'euros de crédits au titre de l'ANRU pour démolir les passoires thermiques et rénover une grande partie des bâtiments sur le plan thermique. Nous avons donc choisi de concentrer les crédits sur des équipements publics situés en dehors de ces quartiers. Paradoxalement, c'est parce que nous investissons davantage dans ces quartiers que nous avons pu orienter le Fonds vert vers d'autres zones.
Notre objectif reste néanmoins que 15 % des crédits du Fonds vert soient dirigés vers les quartiers prioritaires de la politique de la ville, en déterminant les niveaux de financement appropriés entre les quartiers prioritaires de la politique de la ville et ceux de la ruralité.
Vous souhaitez que la DSIL et la DETR puissent compléter ces niveaux et c'est un véritable sujet.
La cohérence de l'action gouvernementale dans ce domaine repose sur trois points.
Le premier point est la mise en place des budgets verts d'investissement dans toutes les collectivités de plus de 3 500 habitants, en collaboration avec l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalités (AMF). Pour ce faire, il convient de définir ce que l'on entend par « dépense verte ». Une route utilisée à 20 % par des vélos peut-elle être mise au crédit d'une dépense « verte » ? De la même manière, lorsqu'il s'agit de financer un bâtiment, il importe de déterminer si la rénovation est vraiment écologique ou s'il serait préférable d'en changer l'affectation. Nous travaillons donc à une typologie précise. Une fois cette typologie et cette capacité de classement établies, nous pourrons fixer des objectifs clairs.
Je rappelle ici que les aides aux collectivités territoriales ne sont pas toujours liées à l'écologie. Par exemple, l'accessibilité des bâtiments pour les personnes handicapées, qui représente souvent des coûts importants, nécessite des enveloppes budgétaires flexibles pour accompagner les petites communes. La DETR finance parfois des projets non écologiques, mais qui répondent assurément à des besoins locaux, comme la construction d'une salle communale ou d'un lieu destiné aux jeunes dans des zones qui en sont dépourvues. Ces dépenses sont tout aussi légitimes que celles visant à développer les mobilités douces.
Concernant l'ingénierie, le fait d'instaurer des enveloppes d'ingénierie entraînerait une augmentation du recours à ces cabinets de conseil dont vous redoutiez l'influence excessive. Comme l'ont justement indiqué les orateurs précédents, il importe de mieux structurer l'offre d'ingénierie publique dépendant de l'État : CEREMA, ANCT, Banque des territoires, ADEME et toutes sortes de capacités à même d'offrir un accompagnement adéquat. Je pense qu'un mix est à trouver.
En effet, pour l'élaboration d'un plan climat-air-énergie territorial ou d'un dispositif pour accompagner la conception de projets, il est évident qu'on ne peut uniquement se reposer sur les services de l'État. Il est nécessaire de disposer de partenaires capables d'apporter des éclairages pertinents. À l'inverse, pour d'autres dispositifs, il peut être souhaitable de s'appuyer sur ce portail.
Nous nous rejoignons sur la nécessité d'examiner la réalité de l'État déconcentré.
Les réductions d'effectifs dans la fonction publique, dont j'ai rappelé l'ampleur au cours des dernières années, présentent la particularité d'avoir été d'autant plus fortes que nous nous rapprochions du terrain. Si nous n'inversons pas ce processus, nous resterons dans une forme d'hypocrisie concernant la déconcentration et la décentralisation. De ce point de vue, l'État doit « balayer devant sa porte » et être capable de réorienter, sur le terrain, une partie de ces créations de postes, car c'est là que les besoins d'accompagnement se font sentir.