Messieurs les rapporteurs, je regarderai avec beaucoup d'intérêts vos conclusions, en particulier cette perspective consistant à faire évoluer le barème de soutien en vue d'augmenter la part de leasing des véhicules électriques.
Je rappelle que l'engagement pris par le candidat, Emmanuel Macron, était de s'orienter vers un prix de leasing se situant autour de 100 euros. Nous nous sommes rendu compte qu'avec nos critères d'aide, certains constructeurs avaient réussi à descendre à quasiment 50 euros. Cela n'était pas la promesse de départ et implique de poser la question de la limite au-delà de laquelle naît un effet d'aubaine.
Nous nous félicitons néanmoins de ce succès éclatant, à hauteur de 50 000 véhicules, ce qui témoigne d'une prise de conscience chez les constructeurs. Je rappelle que, quelques semaines avant le 1er janvier, nous prévoyions 20 000 véhicules, non pas parce que nous ne voulions pas budgéter davantage, mais parce que les constructeurs nous disaient qu'ils ne seraient pas en mesure de fournir plus de 20 000 véhicules dans le cadre du leasing.
En 2019, 43 000 véhicules électriques avaient été vendus en France, en 2023 ce sont 300 000 véhicules électriques qui ont été vendus. Nous sommes passés d'une part d'immatriculation marginale à quasiment un cinquième des immatriculations fin 2023. Cela souligne la nécessité d'investir sur les bornes, en particulier sur les bornes de recharge rapide, ce qui devra nous conduire à appréhender notre soutien de manière différente.
Le faible taux de rétrofit en 2023 reste une petite déception. Je rappelle que le rétrofit consiste à conserver la carrosserie d'un véhicule dont on remplace le moteur. Ce procédé présente un intérêt écologique majeur, car il évite de produire une nouvelle voiture. Sachant que 80 % de l'empreinte carbone d'un véhicule provient de sa fabrication et de sa production, il est essentiel de prolonger la durée de vie de certaines parties de nos véhicules. Nous avons financé 402 primes au titre du rétrofit. Il nous faut donc encore accentuer ce dispositif. Certains départements affichent des taux plus élevés que d'autres.
Par ailleurs, la tendance baissière des prix des véhicules électriques nous oblige à revoir certains barèmes.
Il convient également anticiper la naissance d'un marché de la seconde main. Ces quinze dernières années, peu de Français ont acheté des véhicules neufs. Il est donc essentiel d'examiner comment ce marché de la seconde main, qui va se développe, pourra aider à accélérer la transition.
De plus, une grande partie des achats de véhicules thermiques neufs est réalisée par les entreprises. Ces véhicules connaissent ensuite une seconde vie. Il est donc pertinent de trouver des moyens pour consolider le verdissement des flottes professionnelles.
Je souhaite enfin aborder une question fiscale.
L'actuel barème kilométrique, qui augmente avec la puissance du véhicule, constitue une incitation à acquérir un véhicule de puissance plus élevée. Je considère que l'éthique de responsabilité devrait nous conduire à fixer un barème moyen pour les véhicules. Cela n'empêcherait pas ceux qui le souhaitent d'acquérir un véhicule plus puissant, mais à condition de s'acquitter d'un reste à charge plus élevé. À l'inverse, ceux qui opteraient pour une petite voiture bénéficieraient d'un avantage et rembourseraient plus rapidement leur véhicule. Cette approche favoriserait la responsabilisation individuelle et permettrait d'avancer de manière intelligente.
En outre, certaines questions relèvent directement du ministre de l'industrie et de l'énergie, mais je souhaite apporter quelques éléments.
J'assume pleinement le lien entre véhicules électriques et bioénergie. Je me réjouis d'avoir fait en sorte, avec d'autres ministres, que l'Europe considère une part de neutralité technologique, notamment pour les flottes de bus et de cars.
L'électrification des voitures individuelles est sans doute nécessaire à notre industrie, mais il importe de ne pas immédiatement préjuger de la meilleure solution entre l'hydrogène, le bio-GNV ou l'électrique (pour les bus urbains en particulier). L'Europe reste assez compétitive sur la production de ces véhicules avec des marques comme Iveco et Scania. Il peut être pertinent de s'appuyer sur les productions locales pour adapter les types de motorisations, sans imposer des réponses uniformes dans des contextes variés.
Vous avez évoqué longuement le sujet du bois et je vous en remercie, monsieur le rapporteur, alors que ce sujet essentiel est trop rarement abordé.
Un quotidien national évoquait récemment des inquiétudes concernant les types d'essences à planter pour régénérer la forêt. Le plus grand écart aujourd'hui observé, en termes de planification écologique, ne porte pas sur les réductions d'émissions, mais sur la capacité de stockage et les puits de carbone.
Si nous sommes en ligne sur les objectifs de réduction des émissions pour 2030, nous ne sommes absolument pas au rendez-vous sur les puits de carbone. Il est donc impératif de planter massivement, d'où le plan d'un milliard d'arbres annoncé par le Président de la République. 50 millions d'euros ont été alloués à des chercheurs, dans le cadre d'un Programme et équipements prioritaires de recherche (PEPR), pour déterminer les essences à planter dans chaque territoire de la République et pour avancer sur les méthodes de plantation.
Je rappelle que, selon certaines prévisions et si les évolutions de température actuelles se poursuivent, il n'y aura plus de hêtres en France en 2060. Cela représenterait un bouleversement de nos paysages, une menace pour notre biodiversité et une fragilisation de notre capacité à progresser.
La filière bois est également pertinente pour le bois énergie, à condition de l'aborder de manière globale. Si nous utilisons du bois énergie plutôt que du bois de coupe et des bois nobles, qui devraient plutôt servir à décarboner une partie du secteur du bâtiment, nous devons restructurer toute la filière. C'est notamment la raison pour laquelle un délégué interministériel à la forêt a été nommé. Il faut penser la cohérence du dispositif global et savoir entrer dans les détails sur des questions comme celle des incendies et de la résistance au feu des bâtiments. Nous y travaillons de manière interministérielle.
Quant à l'hydrogène, des promesses existent. Lors de Choose France, lundi dernier, j'ai été surpris par le nombre d'interlocuteurs venus valoriser des projets de décarbonation par l'hydrogène, que ce soit pour leurs industries ou dans une perspective d'investissement. On ressent une forte accélération dans ce domaine. Bien que l'hydrogène ne soit pas la solution à tout, il sera aussi indispensable dans le mix énergétique global et ouvrira de nombreuses possibilités.
Concernant le biométhane, il convient de ne pas verser dans l'excès en transformant les méthaniseurs en activité principale, ce qui entraînerait d'importants déplacements pour les alimenter. Il existe une opportunité significative de diversification grâce à des gisements de production locaux sur lesquels nous devons miser. Je me réjouis de la manière dont le rapport éclairera la capacité du Gouvernement à accélérer sur ces bioénergies.
Il faut aborder le mix énergétique avec beaucoup d'humilité et éviter les certitudes. Compte tenu de l'ampleur du défi, si nous voulons sortir des énergies fossiles, nous aurons besoin de ces nouvelles énergies en vue de sortir du charbon, du pétrole et du gaz.