Chers collègues, je propose de vous présenter les aides à l'acquisition de véhicules propres, portées par le programme 174.
En 2023, les aides à l'acquisition de véhicules propres ont rencontré un succès notable, avec une consommation de 1 392 millions d'euros pour le bonus écologique et de 250 millions d'euros au titre de la prime à la conversion, dépassant largement les prévisions initiales.
Le dispositif de leasing a été déployé en janvier 2024. Les objectifs de vente des véhicules électriques fixés par le Gouvernement ont donc été atteints, ce que traduit la multiplication des volumes par cinq entre 2018 et 2023. La part de marché des véhicules électriques neufs atteignait 16,7 % en 2023, contre 1,9 % en 2019.
Les politiques publiques de soutien aux ménages ont joué un rôle central dans cette augmentation, comme en témoignent la reprise d'initiatives similaires à l'étranger, notamment par l'IRA ( Inflation Reduction Act ) américain.
Les évaluations économétriques menées par France stratégie et l'Institut des politiques publiques estiment qu'entre 2019 et 2021, 40 % de la progression de la part de marché des véhicules électriques s'explique par la politique de bonus et de malus.
Ces derniers mois, deux évolutions importantes ont marqué les aides à la transition et à l'acquisition de véhicules propres.
La première évolution concerne la souveraineté industrielle, avec l'introduction du score environnemental comme condition d'éligibilité au bonus écologique. La seconde évolution porte sur la justice sociale, avec l'entrée en vigueur du dispositif de leasing en janvier 2024. Nous disposons déjà de premières indications relatives au succès attendu de ces mesures.
Le score environnemental constitue une nouvelle condition d'éligibilité pour le bonus écologique, la prime à la conversion et le leasing. Il prend en compte l'empreinte carbone d'un véhicule sur l'ensemble de son cycle de vie avant sa mise en vente, sélectionnant ainsi seulement les véhicules les plus vertueux, notamment selon leurs conditions de production. Un véhicule électrique produit en Europe avec de l'électricité décarbonée n'a pas le même impact environnemental qu'un véhicule produit en Chine par une énergie issue d'une centrale à charbon.
La mise en œuvre de cette mesure a été un succès, tant sur le plan environnemental qu'industriel. Les premières données suggèrent qu'elle a bien permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Depuis le début de l'année, la part de marché des véhicules électriques produits en Europe a progressé de manière spectaculaire et au détriment des véhicules produits en Chine, dont la part de marché est passée de 29 % en 2023 à moins de 18 % en début 2024.
Par ailleurs, le leasing social a connu une expansion notable en début d'année. Le nombre de dossiers a bondi de 25 000 à 50 000, pour un financement public s'élevant à 275 millions d'euros.
À la lumière de ces observations et des nombreux échanges que nous avons eus, le rapport tente d'esquisser quelques pistes d'évolution des dispositifs.
Sur le leasing, nous pourrions nous fixer l'objectif de doubler la part de véhicules concernés, soit un objectif de 100 000 véhicules en 2025.
L'idée générale est de diminuer les subventions tout en augmentant les volumes. Je propose une nouvelle méthode de calcul des subventions. En effet, il pourrait être intéressant de partir d'un volume de véhicules et d'instaurer un système d'enchères à la baisse pour les constructeurs qui réclameraient un certain niveau de subventions. Certains constructeurs seraient ainsi incités à proposer des véhicules à des taux de subventions réduits.
Le deuxième point d'importance est celui de la visibilité à donner à l'évolution de ces aides dans les prochains mois.
Ces dernières années, les aides ont beaucoup varié. Pour que la filière se structure, il est essentiel de fournir une visibilité pluriannuelle.
La stratégie de financement pluriannuel de la transition écologique, inscrite à l'article 9 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 (LPFP 2023-2027), pourrait servir de cadre, notamment par le biais des montants alloués aux bonus et malus qui restent des éléments très structurants de la filière automobile.
En termes de malus et afin de rester en cohérence avec notre politique environnementale, il serait nécessaire d'introduire progressivement le critère du poids, y compris pour les véhicules électriques. Cela répondrait à l'augmentation considérable de la masse des véhicules, qui pose d'évidents problèmes environnementaux et de sourcing en matières premières.
Par ailleurs, l'argent public mobilisé dans le cadre de ces aides devra évidemment prendre en compte les dimensions de pouvoir d'achat et de transition écologique.
Il est aussi essentiel de considérer le contexte commercial global dans lequel nous évoluons. Nous avons tous pris connaissance de l'annonce faite par les États-Unis, en début de semaine, d'une augmentation significative des tarifs sur les véhicules asiatiques. Si le marché américain venait à se fermer, l'un des risques majeurs serait un déversement de véhicules asiatiques sur le marché européen. Il est primordial de garder cela à l'esprit dans les évolutions du bonus qui seront envisagées.
Nous avons un impératif très fort de compétitivité, qui repose sur l'accès à un marché domestique solvable. Il est crucial d'articuler l'évolution future du bonus avec les mesures commerciales prises au niveau de l'Union européenne, qu'il s'agisse de l' antidumping ou de l'extension progressive du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, notamment pour le secteur automobile, ce qui nous semble être une véritable urgence.
En tout état de cause, il faudra envisager avec une grande prudence les évolutions du bonus écologique dans les temps à venir, compte tenu des tensions commerciales très importantes et des risques pour la compétitivité de nos filières.