Sur le plan sociologique, il est nécessaire d'engager une réflexion sur la « culture du viol » dans nos métiers, à savoir une valorisation érotique de la violence. Nous devons aussi combattre l'idée courante selon laquelle un acteur ou une actrice peut tout faire, sans limites. Dans cette « culture du viol », le consentement, mais aussi la sécurité physique et psychique des interprètes, n'ont pas leur place.
Un jeune étudiant arrivant dans une école ne connaît pas bien ses limites et peut tomber sous l'influence d'un enseignant ayant une forte aura, capable de le propulser dans le métier. Il est parfaitement normal de vouloir obtenir des rôles intéressants.
Cependant, il est indispensable d'avoir conscience des limites physiques ou psychiques à ne pas dépasser, à commencer par les actes violents sur soi-même ou sur ses partenaires. Représenter la violence n'implique pas de la subir ou de l'exercer sur d'autres. De même, le fait d'utiliser le vécu traumatique des interprètes pour nourrir leur jeu est une pratique très dangereuse. Cette pénétration de l'intimité psychique d'autres personnes est extrêmement pernicieuse, car elle donne à la victime le sentiment qu'elle a été comprise par un autre dans une zone de vulnérabilité. Ces pratiques, relativement répandues, créent des relations d'emprise et de domination, au point de subjuguer toutes les personnes présentes sur le plateau.
Le respect de l'intimité physique est bien entendu primordial, mais il faut aussi préserver l'intimité émotionnelle. L'une des membres de notre association insistait ainsi sur la différence entre l'intériorité et l'intimité.