Je suppose que vous imaginez de quel ordre peuvent être les pseudo-mises en concurrence entre interprètes, tant masculins que féminins. Lorsque nous nous retrouvons ensemble, il apparaît de manière flagrante que ces mises en concurrence sont un mensonge.
Ce mensonge est alimenté par une forme de mystère qui prévaut dans notre industrie, et peut-être plus particulièrement dans le métier d'interprète. Nous ne sommes que très rarement informés de nos droits tels que prévus par le code du travail.
Les agences artistiques ont leur propre fonctionnement entrepreneurial : les agentes et agents artistiques ne sont payés ni par la production, ni par les interprètes qu'ils représentent. Ils ont un statut indépendant. Le métier d'agent artistique est très mystérieux, et il est difficile de savoir ce qu'ils font précisément.
Cette pseudo-concurrence est alimentée par une forme de mystère sur le métier d'actrice : nous ne devrions pas savoir qui sont les autres actrices passant le casting, ou pour quelles raisons nous ne sommes pas retenues. Ces raisons sont rarement liées aux capacités professionnelles, mais ont plus souvent trait à des aspects physiques.
Les réalisateurs et réalisatrices ne sont pas les seuls à détenir ce pouvoir de décision sur les personnes qu'ils choisissent d'embaucher pour incarner leurs rôles. Les producteurs, les distributeurs et les financeurs donnent aussi leur avis, sans parler des plateformes et des chaînes.
Je souhaiterais aussi préciser qu'à l'ADA, notre rôle consiste à participer aux discussions et réflexions sur les conditions de travail dans notre industrie. Nous organisons des réunions régulières sur ces thématiques. Il nous est apparu indispensable d'inclure nos collègues hommes dans ces travaux.
Il nous est arrivé de proposer des réunions mixtes, en vue d'échanger sur les discriminations raciales, homophobes, transphobes et autres. Mais rapidement, les questions ayant trait aux violences sexistes et sexuelles ont été au centre des réflexions. J'ai été surprise de constater cela, car j'inclinais plutôt à penser que ces questions étaient dépassées. Mais le fait est que la plupart des personnes qui participent à nos réunions ont moins de 35 ans, et toutes ont besoin de parler des violences sexistes et sexuelles subies quotidiennement, sur tous les projets pour lesquels elles sont employées, à toutes les étapes : casting, préparation, répétition ou tournage.