La Ficam réunit l'ensemble des prestataires techniques intervenant dans les productions cinématographiques et audiovisuelles ou dans le domaine de la publicité. La filière comprend plus de 700 entreprises et génère 1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires. Notre fédération compte près de 120 adhérents, qui représentent environ 70 % de la valeur de la filière et opèrent dans les secteurs suivants : les équipements et locaux pour les tournages, les locaux et activités de postproduction d'images, les effets visuels, les postproductions son et postsynchronisations, les doublages et sous-titrages, les préparations en vue de la diffusion dans les salles ou dans les médias, la restauration des copies de films, la sauvegarde et la conservation. La chaîne est assez longue, et couvre des cycles allant de 8-10 mois à 14-16 mois. Dans le domaine des effets visuels, la Fédération intègre aussi des entreprises de services de production en animation, qui ne font pas partie stricto sensu des producteurs.
Notre fédération représente donc des métiers très divers, avec une proportion de femmes et d'hommes variable selon les secteurs. Certains métiers mobilisent des effectifs nombreux, tandis que d'autres – la postproduction son ou image, par exemple – se déroulent en petits groupes. Ainsi, les conditions d'exercice sont très disparates.
Notre secteur n'est pas atypique par rapport aux autres types d'activité. Historiquement, la proportion d'hommes dans les métiers techniques était plus importante qu'ailleurs, car ces activités exigeaient le port de charges lourdes. Le déséquilibre s'atténue progressivement. Aujourd'hui, les femmes représentent 30 % des effectifs, et leur part s'accroît peu à peu. Dans certains secteurs tels que l'animation, la proportion de femmes est quasiment identique à celle des hommes. En raison de la surreprésentation des hommes, les remarques sexistes étaient fréquentes. Toutefois, les comportements s'améliorent.
La particularité de notre secteur tient au fait que le client est le producteur. Un studio de tournage met à disposition du producteur les locaux et les équipes fournissant le matériel, mais le tournage est géré par la production. En postproduction ou dans l'étalonnage, la salle est louée au réalisateur, qui vient avec son propre personnel. De ce fait, nos employés sont souvent moins nombreux dans nos locaux que les personnels extérieurs.
Les agissements répréhensibles sont en nombre limité, et nos entreprises, qui appliquent la tolérance zéro envers ces pratiques, n'hésitent pas à mener des actions vigoureuses pour y mettre fin, dans la limite de leurs pouvoirs. Elles font tout leur possible pour encourager les victimes à se signaler et pour les protéger.
Au sein de la Ficam, une commission sociale traite de ce sujet.
Nous sommes confrontés à deux catégories d'agissements : des faits internes, d'une part, et des faits commis par des personnels des clients sur nos employés – ou réciproquement –, d'autre part. Nous entretenons des relations permanentes avec nos clients, en milieu ouvert ou fermé.
Les agressions sexuelles sont ponctuelles et très variées. Elles sont plutôt morales et peuvent consister en plaisanteries à caractère discriminatoire, en propos à caractère sexiste, raciste, homophobe ou transphobe ou en propositions inappropriées à connotation sexuelle.
Une autre question concerne les agissements se déroulant à l'extérieur des locaux, mais en lien avec le travail. Je pense en particulier aux tournages, mais aussi aux pots conviviaux. Au regard des dispositions légales, ces faits sont identiques.
Dans notre industrie, les remontées les plus courantes concernent des propos déplacés ou agressifs, parfois difficiles à qualifier. Selon le résultat des investigations effectuées, les entreprises procèdent à des licenciements, lorsque les actes sont avérés, ou bien à des avertissements et à des déplacements de postes, lorsque les preuves sont difficiles à réunir.
Il est plus difficile d'agir envers des clients ayant des comportements déplacés. Dans ce cas, la réponse apportée à ces faits dépend de la taille de l'entreprise en question. Soit la société de production possède une organisation suffisante pour traiter ce type de situation, soit sa taille ne lui permet pas de disposer d'un service de ressources humaines efficient. Dans ce cas, la relation avec le fournisseur peut devenir compliquée. Ces événements sont difficilement quantifiables, mais existent.
Dans les milieux ouverts, les risques de dérapage de la part de nos employés sont relativement limités. Dans la postproduction son et image, la situation peut être différente, car deux ou trois employés partagent un studio, où la luminosité est souvent faible. Pour autant, nous n'avons pas eu connaissance de cas graves de passage à l'acte. Les signalements concernent essentiellement des attaques verbales, qui sont inadmissibles et qui sont sanctionnées.
Il conviendrait de s'assurer que tous les opérationnels sont formés, et de réunir l'ensemble des équipes des prestataires et des clients au début de chaque tournage pour un point de sensibilisation.
De plus en plus de participants suivent les formations du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), qu'il s'agisse des mandataires ou des personnes exerçant une responsabilité sur les prestataires en production et les prestataires techniques. De fait, nous sommes soumis à cette obligation depuis un an. Cette action porte ses fruits, mais il faudrait étendre ces formations à toutes les personnes assumant un rôle d'encadrement ou de supervision. Il est essentiel de savoir comment réagir à une agression, mais aussi comment répondre à un signalement d'agression.
Tout dépend de la taille de l'entreprise en question. 40 % des adhérents de la Ficam comptent moins de dix salariés, et seuls cinq membres ont plus de 50 salariés.
Il me paraît tout aussi déterminant de former les dirigeants, gestionnaires et managers au traitement des signalements que d'informer les salariés sur la réaction à adopter face à une agression.
Des actions sont menées au sein de notre branche depuis plusieurs années. Ainsi, un accord sur l'égalité entre les femmes et les hommes a été signé en juillet 2018. L'accord étendu, en date de 2020, inclut expressément la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Cette cause est reprise par la cellule interprofessionnelle initiée par la Fédération des entreprises du spectacle vivant (Fesac), dont M. Mirski est président.
En 2019, le ministère de la culture a lancé un plan de lutte contre le harcèlement. Dans ce cadre, des assises ont été organisées par le CNC.
Par ailleurs, les partenaires sociaux ont créé une cellule d'écoute gratuite et anonyme, à destination des victimes et témoins de violences sexuelles. Elle est désormais active depuis quatre ans, et opérée par Audiens. La Ficam participe à cette initiative.
Nous travaillons aussi avec Audiens en vue de constituer une cellule à même d'informer les responsables d'entreprise ou d'unité ayant eu connaissance de faits à caractère sexiste ou sexuel. De fait, les chefs d'entreprise peuvent se sentir désemparés face à ce type de situation, même s'ils en mesurent la gravité.