Je n'en sais rien.
Je ne connais pas vraiment les coûts de production des éleveurs bovins, d'autant que leurs revenus dépendent aussi des primes et des aides perçues. Quant aux éleveurs porcins, les chiffres montrent qu'ils sont, depuis deux ans, dans une conjoncture de revenus exceptionnellement favorable. Ils s'interdisent de parler d'Egalim : cela ne les concerne pas ! Alors que nous traitons, dans les deux cas, avec des marchands de viande, on nous demande de trouver des solutions et d'appliquer la loi Egalim pour la viande bovine mais de ne surtout pas toucher à cela pour la viande porcine…
Pourquoi les cours se sont-ils redressés avant la période du covid ? Nous avons voulu prendre en compte une certaine détresse des acteurs en amont de la filière. Un dialogue s'est instauré avec les organisations syndicales et nous avons constaté que la situation devait changer, faute de quoi les choses ne se passeraient pas bien. Nous nous sommes alors engagés dans une revalorisation du prix des productions animales. Dans le même temps, nous avons entamé une démarche visant à revaloriser le steak haché vendu par la grande distribution, en expliquant les raisons de notre requête. Dans une période où la demande était relativement bonne, les planètes se sont alignées et, du fait de la revalorisation des coproduits et d'un certain nombre d'éléments extérieurs, nous avons pu retrouver un bon équilibre carcasse et procéder à de bonnes revalorisations.
C'est alors qu'est arrivé le covid. Le pays s'est fermé, les importations ont cessé et nous avons vécu en vase clos. Nous avons connu un véritable black-out européen : l'ensemble des productions ont fortement diminué et les tarifs des animaux se sont fixés, dans toutes les catégories d'élevage, à des niveaux élevés. Il a bien fallu que nous répercutions ces hausses sur le prix des muscles et des produits élaborés. Autrement dit, nous avons dû revaloriser nos propres tarifs. Je ne vous rappellerai pas les discours politiques entendus en 2022, lorsque l'on nous demandait d'aider les producteurs.
Dix-huit mois plus tard, cependant, l'inflation a commencé à fatiguer tout le monde et le consommateur s'est mis à dire qu'il allait manger moins. Les politiques, qui nous demandaient auparavant d'aider les éleveurs, ont alors un peu changé leur discours : il fallait désormais que les prix se calment. Dans le même temps, nous avons subi une explosion du coût de l'énergie, si bien que la hausse des prix de nos produits a parfois été supérieure à 30 %. Je vous passe le débat sur la distinction entre les marques industrielles et les marques propres des distributeurs.
Pour les consommateurs, la hausse des prix a donc été terrible. Il en a résulté une chute de la consommation, provoquant elle-même une chute de la production contribuant à la baisse de la consommation. Nous avons atteint un équilibre très instable laissant de nombreuses entreprises en grande difficulté. De surcroît, comme un malheur n'arrive jamais seul, nous avons assisté à un effondrement du cours des coproduits et du cinquième quartier à l'échelle mondiale.
Aujourd'hui, alors que la loi Egalim nous impose une contractualisation assez forte avec les acteurs de l'amont de la filière, que nous continuons d'accompagner, les ventes sont à la baisse et les prix, qui restent élevés, sont un peu malmenés. Parallèlement, les acteurs de la distribution veulent en découdre en mettant en avant des marques de distributeur (MDD) et en nous livrant une guerre des prix que je qualifierai de farouche.