L'article L. 442-7 du code du commerce comporte bien deux critères. Le premier dispose qu'il faut « faire pratiquer par son fournisseur » : il faut donc démontrer que l'acheteur a exercé une contrainte sur son fournisseur pour aboutir à ce prix. Ce critère nécessite de caractériser un comportement, et pas uniquement un niveau du prix. C'est assez classique : dans d'autres domaines qui ne présentent pas le même niveau d'exigence, le droit de la concurrence sanctionne des prix prédateurs en recherchant les mêmes éléments, tenant tant à la pratique des acteurs qu'aux niveaux économiques mis en œuvre.
La deuxième partie de l'article nous invite à caractériser un prix de cession abusivement bas en tenant compte « notamment » des indicateurs de coûts de production « ou, le cas échéant, de tous autres indicateurs disponibles, dont ceux établis par l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires ». Il existe donc deux familles d'indicateurs.
La formulation de cette disposition sous-entend que nous sommes dans une logique de faisceau d'indices et que l'on prend en compte l'ensemble des éléments économiques du cas d'espèce. Une conjoncture particulière peut en effet expliquer une situation très éloignée de la moyenne, dans un sens ou dans l'autre. On peut imaginer que, dans le cadre d'une enquête, les professionnels concernés explicitent eux-mêmes les circonstances qui ont amené à la formation du contrat ; je ne pense pas qu'on puisse les rejeter par principe. Nous vérifions alors la cohérence des informations qui nous sont communiquées. C'est ce raisonnement en faisceau d'indices qui permet de conclure si l'on est ou non face à un prix de cession abusivement bas.
À ce jour, sur les plus de quatre-vingt-dix contrôles que nous avons effectués, nous n'avons pas rencontré de situation susceptible de réunir les deux types d'éléments, à la fois sur une éventuelle contrainte de l'acheteur et sur un aspect plus quantitatif qui permettrait de qualifier un prix d'abusivement bas.