Il est difficile de répondre de manière générale, car certaines choses évoluent plus rapidement que d'autres. Par exemple, je me souviens qu'en 2002, lorsque l'on a annoncé que les familles pourraient consulter les rapports établis par les services de l'ASE, cela a provoqué un véritable séisme. Tout le monde pensait que cela ne serait jamais possible, mais cela s'est mis en place relativement vite. Il y a eu une réelle adaptation des écrits professionnels en un temps assez court. Pour d'autres aspects, comme l'audition de l'enfant, le travail est encore en cours. Les dispositions relatives au tiers digne de confiance commencent à peine à être mises en œuvre.
Les réflexions autour des adaptations du statut ont débuté, notamment avec l'idée de créer un véritable projet construit pour chaque enfant, ainsi qu'un lien avec un adulte ressource qui soit durable et gratuit. Ce lien n'est pas toujours affectif. Parfois, il peut s'agir de l'assistante familiale qui maintient un lien gratuit avec l'enfant, mais c'est de moins en moins fréquent. Je suis des enfants depuis plus de vingt ans et, auparavant, beaucoup plus d'enfants conservaient des liens durables avec leurs assistants familiaux et avaient des parcours linéaires avec eux. C'est devenu plus complexe.
Les adaptations du statut ont commencé de manière très différenciée selon les départements. Par exemple, la commission d'examen de la situation et du statut des enfants confiés (Cessec) va seulement commencer ses travaux dans la Loire, huit ans après la création de ce dispositif. D'autres départements l'ont mise en place immédiatement. Cela progresse tout de même un peu plus rapidement que la déjudiciarisation des décisions.
Il faut absolument penser ces adaptations du statut avec l'enfant dans un projet positif pour celui-ci, sans nécessairement se précipiter vers le délaissement. En effet, un enfant qui se sent abandonné par tous perçoit cette décision comme extrêmement violente, surtout lorsqu'il est dans une institution où il va très mal, sans lien extérieur et avec peu de liens au sein de celle-ci. Comment envisager l'adaptation du statut de l'enfant en fonction de ses besoins spécifiques ? Ce travail avance lentement et nécessitera du temps.
Décider de la rupture des liens avec la famille est une question complexe qui doit être individualisée. On ne peut se contenter de généralités. Par exemple, les juges québécois adaptent les temporalités des mesures de protection de l'enfance aux différentes situations. Ils considèrent qu'un enfant placé à 7,8 ou 9 ans, ayant construit des liens avec ses parents, ne comprendrait pas nécessairement une rupture de lien après deux ou trois ans sans retour dans sa famille. Il est donc crucial de considérer le parcours de chaque enfant. Certains enfants, malgré leur parcours en protection de l'enfance, ne peuvent accepter une coupure des liens avec leurs parents. Cependant, la situation diffère pour les enfants placés très précocement par rapport à ceux placés plus tardivement.