Je m'en doute, et je l'espère. Mais c'est ce qui se passe.
Vous me demandez si l'on peut améliorer le processus de décision démocratique. Si je vous répondais par la négative, cela vous surprendrait. On peut toujours faire mieux – en démocratie, on est en quête permanente d'amélioration – mais il ne faut pas non plus écorner un certain nombre de principes. À un moment donné, il faut décider. Le tout est de savoir si la majorité est légitime, c'est-à-dire issue de la souveraineté nationale. Dans le dossier de l'A69, elle l'est. Il faut aussi qu'un juge indépendant puisse se prononcer si des irrégularités de procédure sont constatées – or vous l'avez dit, les recours n'ont pas manqué.
Je le dis solennellement : en recourant la violence, on sort de l'État de droit et du cadre démocratique. Je vous ai expliqué pourquoi j'étais favorable à l'A69, et je ne conteste pas que l'on puisse y être défavorable, mais rien ne saurait justifier que les opposants fassent valoir leur point de vue par la violence morale ou physique.
Ce que nous pouvons améliorer, c'est la durée de la procédure. J'observe que les opposants l'ont bien compris, qui contribuent à son allongement. La durée, en effet, est l'ennemie de la crédibilité publique. J'ai la faiblesse de penser, même si nous en avons moins parlé, que les personnes favorables au projet sont plus nombreuses que les opposants. Or à leurs yeux, le fait que le projet s'éternise entame le crédit de la parole publique. À quoi servent les autorités si les projets n'aboutissent pas ? Les conditions sociologiques et économiques ayant présidé à une décision peuvent évoluer, ce qui a d'autant plus de chances de se produire que le projet dure.
Il faut certainement revoir les procédures, pour désamorcer les conflits, expliquer davantage et tenir compte des arguments échangés lors des concertations. Cela étant, des progrès ont été réalisés. J'ai connu une époque où les concertations étaient très formelles. Aujourd'hui, il arrive que les commissions d'enquête fassent évoluer le contenu même de la décision publique – cela a été le cas, je crois, dans le dossier de l'A69.
Pour préserver le crédit de la parole publique, il faut que les décisions prises par les élus au suffrage universel soient respectées. Votre commission, monsieur le président, madame la rapporteure, doit en tenir compte. Une bonne démocratie respecte les oppositions – c'est même sans doute à cela qu'on la reconnaît – mais ne bafoue pas la majorité.