Les mots sont peut-être un peu forts, mais je pense que nous sommes confrontés à une sorte d'infantilisation de la société. Il est très difficile de lutter contre cet état d'esprit de gratuité et cette impression de disposer de ressources sous le tapis grâce à la dette. Pour autant, nous pouvons redresser les finances publiques. Je suis impressionné par l'exemple du Portugal. Je me souviens de ce pays en 2011, au moment où la crise des dettes souveraines produisait des effets terribles sur la population. Je me suis rendu au Portugal et en Espagne avec des collègues parlementaires et je me souviens de la pauvreté extrême que l'on voyait dans les rues. Ils ont fait des efforts énormes et sont sortis de la crise. Objectivement, ils sont meilleurs que nous.
Nous n'arrivons pas à maîtriser la dépense publique, sous toutes ses formes. Quand je suis arrivé à l'Assemblée nationale en 1993, la dépense publique était déjà au-dessus des 50 % du PIB : de mémoire, elle atteignait 54 %, contre 57 % aujourd'hui. Je ne cède pas au découragement pour autant, mais en 2002, les intérêts représentaient 37 milliards dans le budget de l'État pour une dette d'à peu près 900 milliards. En 2019 – je parle sous votre contrôle – les intérêts étaient au même niveau, aux alentours de 37 milliards, mais la dette avait plus que doublé. Aujourd'hui, la situation est inverse.
Notre taux de prélèvement obligatoire, aux alentours de 47 %, a atteint un niveau maximal quand on le compare avec celui de nos voisins. On peut sans doute chercher plus d'équité et une meilleure répartition, mais la dépense publique est un effort continu. La révision générale des politiques publiques (RGPP) a été beaucoup critiquée. Ce dispositif un peu curieux était piloté au plus niveau, par l'Elysée et Matignon, et seuls deux élus – Philippe Marini, rapporteur du budget au Sénat et moi-même – y participaient. Dès 2008 – donc avant 2011, date à laquelle nous avons senti les problèmes de financement de la dette – nous avons examiné une à une toutes les politiques publiques et cela a produit des effets. En 2017, le Comité action publique 2022 (Cap 2022) a remis un rapport contenant beaucoup de bonnes idées, mais il a été immédiatement oublié.