C'est très difficile à évaluer mais, pour la question qui nous intéresse, ce poids me semble assez marginal – peut-être 2 %. Le CNEN n'examine que les textes qui ont une incidence sur les collectivités territoriales, et la question du surcoût des normes relève précisément de ses missions. L'essentiel des coûts supplémentaires que nous examinons est lié à la masse salariale, à l'occasion de l'attribution de points d'indice supplémentaire, ou à la transition énergétique. J'aurai toutefois l'honnêteté de dire que ce n'est qu'une partie du problème d'ensemble de nos 3 100 milliards de dettes, même s'il est certain que nous pourrions faire des économies.
Ainsi, nous avons examiné la semaine dernière un projet de loi, qui sera bientôt étudié par votre assemblée, visant à transposer des directives européennes en matière de cybersécurité. Ce texte n'étant assorti que d'études d'impact très parcellaires, nous avons exigé d'en savoir plus. Il est alors apparu que son application représenterait pour toutes les collectivités locales, communautés de communes, communautés d'agglomération, régions et départements, un coût d'investissement de l'ordre de 200 000 euros, voire beaucoup plus, par collectivité. Multiplié par le nombre de collectivités concernées, le chiffre global est de 300 millions, ce qui n'est pas rien ! Or une attaque cyber comme celle que le département de Seine-et-Marne a subie l'an dernier coûte très cher. Que fera l'Assemblée nationale ? À l'unanimité, le CNEN a demandé une plus grande progressivité dans l'application de ces mesures, qui ne devaient entrer en vigueur que sur trois ans, et une plus grande différenciation entre les types de collectivités. En tout état de cause, des contrôles seront instaurés au bout de trois ans.
Les normes qui s'appliquent aux collectivités territoriales pèsent moins sur l'investissement que sur le fonctionnement. Ainsi, sur les coûts supplémentaires de 2,5 milliards liés aux mesures prises en 2022, dont on a beaucoup parlé, une part de 1,7 milliard correspond aux effets de deux décrets relatifs à l'isolation et à la régulation du chauffage dans les bâtiments tertiaires, or les études d'impact de ces décrets prennent en compte le coût de la technologie pour l'année N+1, mais pas les économies qui pourront être réalisées sur les dix années suivantes. Il faut donc relativiser la pertinence de ces calculs. En revanche, les normes pèsent beaucoup sur les coûts de fonctionnement récurrents – mon expérience de maire me l'a confirmé. On se prend parfois à penser – j'espère ne pas dire une énormité ! – que les normes d'encadrement de la petite enfance, par exemple, sont peut-être excessives : on crée alors une commission, mais celle-ci recommande de relever encore ces normes. Nous sommes dans un système marqué par une déconnexion complète entre l'hémisphère droit de la dépense et l'hémisphère gauche de la recette.
J'appelle votre attention sur la question très perverse des 3 % de déficit. Dans le langage commun, on suppose qu'un déficit de 3 % signifie qu'on dépense 103 pour 100 de recettes, et que ce n'est pas vraiment un problème. Or ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit, mais de 3 % du PIB. Du reste, ce chiffre de 3 % a été décidé sur un coin de table, à une époque où l'on voulait, dans les conditions du début des années 1990, stabiliser la dette à 60 % du PIB, avec un taux de croissance de 5 % par an. Aujourd'hui, avec un taux d'endettement de 110 % et un taux de croissance largement inférieur à 5 %, cet objectif n'a plus aucun sens. Il ne s'agit plus du tout d'un déficit stabilisant qui permet de maintenir la dette à 60 %. Il faut donc prendre conscience du fait que le déficit ne devrait pas être de 3 %, mais de zéro. En tout cas, si nous voulons réduire notre dette, il doit être sensiblement inférieur à 3 %.