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Intervention de Pauline Spinas-Beydon

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 15h00
Commission d'enquête sur les manquements des politiques de protection de l'enfance

Pauline Spinas-Beydon, directrice de la Mecs Saint-Jean à Sannois :

Concernant les permis de construire, j'ai obtenu rapidement l'autorisation pour construire et ouvrir une maison destinée à quatre jeunes en difficultés multiples, sans rencontrer de problèmes. Cependant, il faut expliquer le projet au voisinage. À mon niveau, je n'avais donc pas connaissance de cette difficulté. Il est souvent plus compliqué de trouver des bâtiments adaptés pour ouvrir de nouveaux dispositifs, notamment parce que, au-delà d'un certain nombre d'enfants, il faut respecter les normes d'accessibilité. Les délais et les coûts des travaux d'accessibilité peuvent être importants, car les bâtiments disponibles ne sont pas toujours conformes.

Concernant l'éducation et la formation au sein de nos structures, lorsque je suis arrivée, environ 50 % des jeunes étaient scolarisés en interne. Aujourd'hui, ce chiffre est tombé à 30 %. Pourtant, les internats jouent un rôle important en matière de prévention ; ils accueillent les parents et permettent aux enfants de bénéficier d'une scolarité adaptée. Les internats de prévention, dont les parents payent en fonction de leurs moyens, offrent des classes réduites et un encadrement éducatif renforcé, grâce aux dons dont bénéficient les Apprentis d'Auteuil. Ils proposent également des projets de raccrochage scolaire. Par exemple, le collège avec lequel je partage le site utilise le sport pour favoriser le raccrochage scolaire. Les lycées professionnels internes offrent des formations avec des métiers à vocation, permettant aux enfants de poursuivre leurs études jusqu'au niveau du CAP et au-delà. Nous proposons aujourd'hui des solutions sur mesure. Je peux me permettre de dire, comme une grande chaîne de restauration rapide : « venez comme vous êtes ». Certains jeunes prennent le menu complet, d'autres choisissent des options spécifiques. Nous avons permis aux jeunes de l'ASE d'être scolarisés à l'extérieur, ce qui a nécessité des moyens d'accompagnement. De même, les élèves externes bénéficient du savoir-faire des Apprentis d'Auteuil à travers des dispositifs spécifiques.

La mixité des publics est essentielle. Ce que vous mentionnez concernant les manquements dans la protection des enfants est de moins en moins vrai, même s'il subsiste cette idée qu'un enfant doit être protégé en étant coupé de tout. Dans les projets d'établissement, chaque enfant doit avoir le droit à une activité extérieure et être intégré dans la vie locale. Les inscriptions pendant les vacances dans des organismes de vacances sont favorisées. C'est primordial. Les institutions, parfois perçues comme fermées, doivent se rapprocher des acteurs locaux pour se faire connaître et affirmer que nos enfants sont avant tout des enfants comme les autres.

Pour répondre à la question sur la réussite scolaire, qui fait partie de l'ADN des Apprentis d'Auteuil, la place des bénévoles dans la protection de l'enfance est fondamentale. Les lois ont évolué concernant le parrainage et le mentorat est aujourd'hui une réalité. Il m'est impossible d'assurer une qualité d'accompagnement scolaire optimale, même avec trois ou quatre éducateurs pour un groupe de dix enfants. Les devoirs, c'est une responsabilité partagée entre l'enfant et l'adulte. Il est essentiel de bénéficier de regards extérieurs, notamment par le biais du bénévolat. Mon projet, en particulier pour les plus jeunes, repose sur l'idée d'un enfant accompagné par un bénévole pour les devoirs. Il est fondamental d'apprendre à faire cohabiter bénévoles et professionnels de manière complémentaire. Pour les plus grands, le mentorat joue un rôle central. Il est primordial que ces enfants soient perçus comme les enfants de la Nation et que chacun, dans la mesure de ses capacités, puisse apporter son aide.

En ce qui concerne le PEAD, je ne le conçois pas de la même manière. Nous l'avons développé dans le département, où il y avait très peu d'AEMO renforcées. La formule actuelle, décidée par le magistrat, peut à tout moment basculer vers un placement classique. Elle n'a jamais été perçue chez nous comme une alternative moins coûteuse au placement, et les magistrats restent vigilants. Notre prix de journée a été récemment fixé à environ 90 euros. Cela nous permet d'anticiper des temps de repli en situation de crise, mais aussi des besoins de respiration pour l'enfant, comme l'envoi en colonie ou d'autres activités. Nous prévoyons également des enveloppes sur mesure pour répondre aux besoins spécifiques de l'enfant. Nous devons rester vigilants face à un glissement. Nous devons être attentifs aux situations renvoyées en PEAD, car elles sont parfois impossibles à gérer. Bien que le maintien à domicile puisse être pertinent pour l'enfant, des effets collatéraux sur les frères et sœurs peuvent exister. Nous avons alerté sur ce point, soulignant l'importance du dialogue avec les magistrats. Pour l'enfant, le PEAD peut être crucial, mais pour le petit frère ou la petite sœur de trois ans, exposés aux crises, scarifications, prostitution, et autres comportements perturbateurs, le développement du langage peut être compromis. Il est donc impératif de faire preuve de la plus grande vigilance.

La question de la régularité de nos rencontres avec les magistrats sur ces mesures un peu cousues de fil blanc est intéressante. En bonne pratique, ces réunions regroupant magistrats, services de l'ASE et acteurs du PEAD, sont essentielles pour s'ajuster et se comprendre mutuellement, afin d'éviter toute idée erronée de part et d'autre. Par exemple, il est parfois souhaitable de ne pas séparer les très jeunes enfants de leur mère. Cependant, il a été nécessaire d'expliquer nos interventions en précisant : « Attention, mesdames et messieurs les magistrats, soyez conscients qu'à un moment donné, nous fermons la porte du domicile et n'assurons pas une présence continue au domicile ». Il faut tenir compte de l'évaluation des risques et de la prise de décision appropriée au bon moment.

Je ne réponds pas de manière exhaustive sur l'AEMO renforcée, car elle varie autant que le nombre de départements existants. Certains PEAD peuvent ressembler à des AEMO renforcés, comme l'a d'ailleurs précisé la Cour de cassation.

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