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Intervention de Pauline Spinas-Beydon

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 15h00
Commission d'enquête sur les manquements des politiques de protection de l'enfance

Pauline Spinas-Beydon, directrice de la Mecs Saint-Jean à Sannois :

Ces dernières années, de nombreux départements ont développé des alternatives aux placements, comme les placements à domicile ou les services d'accueil modulables. Il est important de souligner que cela constitue une avancée significative dans la gestion des problématiques familiales. Lorsque je suis arrivée dans le secteur de la protection de l'enfance il y a quatorze ans, les options étaient limitées entre, d'une part, une mesure d'aide éducative à domicile, souvent peu intensive, et d'autre part un placement de l'enfant. En tant que directrice, j'ai souvent été confrontée à des familles dont les situations avaient évolué, où les éléments de danger avaient été levés, mais où les placements persistaient, avec la crainte de remettre les enfants avec leurs parents après plusieurs années de séparation. Les effets collatéraux des placements étaient souvent délétères pour l'enfant, même lorsque la situation de danger initiale était résolue. Pour répondre à ces défis, nous avons mis en place des systèmes permettant de maintenir l'enfant dans son milieu naturel, avec des interventions fréquentes, parfois quotidiennes, en connexion étroite avec la maison d'enfants en cas de crise. Cette approche exige une grande réactivité et une coordination étroite entre les équipes de protection de l'enfance, avec des astreintes 24 heures sur 24. Ces dispositifs ont enrichi notre capacité d'accompagnement et amélioré notre intervention dans des situations où le danger pour l'enfant était présent, mais sans malveillance parentale. Souvent, il s'agissait plutôt d'un besoin de guidance parentale intensive, en raison de différences culturelles ou de maladies mentales enracinées chez les parents. Lorsque des ressources et des éléments positifs sont identifiés, nous pouvons éviter la séparation.

Nous sommes confrontés aux événements indésirables. La manière dont nous abordons ces situations est essentielle. Nos documents de référence, notamment la charte du management, jouent un rôle crucial pour déterminer comment la parole d'un éducateur sera reçue. Sera-t-il réprimandé ou écouté ? Il est également important de rappeler à chacun ses obligations lorsqu'il est témoin de certains faits. Tous les établissements doivent élaborer des plans de prévention de la maltraitance. Il est donc impératif de vérifier, notamment à travers les programmes d'évaluation externes et les référentiels de la Haute Autorité de santé (HAS), si l'établissement a bien pris en compte cette exigence. Parfois, nous doublons ces vérifications par des audits internes, où nous interrogeons directement les enfants pour savoir s'ils connaissent les procédures à suivre en cas de problème. Je suis convaincue que la manière d'incarner le métier de directeur est primordiale. On peut disposer de tous les logiciels et outils possibles, il est indispensable que les responsables d'établissements, les responsables de l'ASE en France et les magistrats se rendent dans les établissements et rencontrent les jeunes sur le terrain. Cette présence permet de constater de nombreuses choses. Une culture de la transparence s'est développée. Le fait que les paroles soient écoutées encourage la libération de la parole et permet de mieux appréhender les situations. Un autre aspect important est le pilotage par le directeur, en lien avec les services de l'ASE, des profils des enfants accueillis. Parfois, lorsque les places sont limitées, le département peut imposer l'accueil d'un enfant en disant : « Vous avez une place de libre, vous le prenez. »

La question du pilotage est essentielle. Il ne s'agit pas de placer l'enfant abuseur à côté de l'enfant abusé. Le directeur doit pouvoir dire : « Non, ce n'est pas pertinent, ce n'est pas possible. » Il est crucial de préserver cette capacité de décision, sinon, on pourra toujours se lamenter. Parfois, c'est la chronique d'un drame annoncé. Il faut assumer qu'une place reste vacante si nécessaire, pour le bien du groupe. Il est impératif d'établir un lien de confiance entre les acteurs qui doivent pouvoir communiquer et savoir que, lorsque les moyens d'aider existent, ils sont utilisés. Cela soulève la question des marges de manœuvre, du nombre de places disponibles et de la pression exercée, qui peut parfois entraîner des dysfonctionnements potentiels. Il est crucial que les responsables des admissions puissent gérer cette situation. La question des lieux de répit en bout de chaîne est également posée. Lorsqu'il y a des événements ou des signes avant-coureurs, comment les prévenir ? Entre collègues, il est essentiel de se concerter, parfois de mettre fin à des prises en charge, et de travailler sur des orientations rapides pour éviter des drames.

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