Avant d'aborder l'impact du projet d'accompagnement vers l'âge adulte, je tiens à préciser que la loi Taquet a introduit un article discriminant pour les enfants qui n'ont pas été repérés avant leur majorité. Depuis le 7 février 2022, les jeunes suivis ou anciennement suivis par l'ASE bénéficient de cette aide. Cependant, d'autres jeunes de moins de 21 ans et ne bénéficiant pas d'un soutien familial ou de ressources financières suffisantes ne sont pas accompagnés de manière systématique ; ils peuvent seulement bénéficier d'une prise en charge temporaire. La loi crée donc elle-même une discrimination notable, qui s'est aggravée en février dernier avec l'exclusion des jeunes sous obligation de quitter le territoire français (OQTF) de l'obligation de prise en charge par le département. Par ailleurs, le contrat d'engagement jeune (CEJ) fait également une différence notable entre les jeunes relevant de l'ASE et ceux relevant de la PJJ. Pour les premiers, il est explicitement mentionné que le CEJ vient en complément de l'accompagnement départemental. En revanche, les jeunes placés sous la PJJ ne peuvent bénéficier du CEJ que s'ils ne bénéficient plus de suivi éducatif, alors que ce contrat vise l'insertion et non l'éducation. Il est donc évident que la loi comporte des incohérences qui ne garantissent pas les mêmes droits à des jeunes ayant pourtant des besoins similaires.
Le collectif « Cause Majeur ! » souhaite garantir à l'ensemble des enfants ayant les mêmes besoins le droit à un projet d'accompagnement vers l'âge adulte, fondé sur un socle socio-éducatif. L'objectif est de permettre aux jeunes de développer une « sécurité intérieure » et une autonomie en leur offrant un soutien tant éducatif qu'affectif, à travers le développement de réseaux de pairs aidants, de marrainage, de parrainage et de mentorat. Ce projet d'accompagnement vers l'âge adulte est construit en partenariat avec le jeune au lieu de lui être imposé. Il ne s'agit pas d'un contrat, mais bien d'un projet qui repose sur ses envies, ses besoins, ses appétences et ses rêves, comme le souligne le Conseil d'orientation des politiques de jeunesse (COJ). Le suivi par des référents et l'accompagnement socio-éducatif lui permettent de développer une confiance en lui et de se saisir des différents leviers d'insertion tels que le logement, la gestion des ressources financières, la santé, les loisirs et la culture. Nous avons également formulé plusieurs propositions pour permettre aux professionnels de revoir leurs méthodes d'accompagnement, afin de favoriser davantage l'autonomie des jeunes, tout en respectant leur cheminement personnel.
Nous nous sommes interrogés sur le coût de cet accompagnement. Nous ne pouvions pas nous contenter de recenser le nombre de jeunes actuellement pris en charge et d'en estimer le coût, dans la mesure où une trop large proportion d'entre eux échappe au système. Nous avons retenu le nombre de jeunes de 17 ans au 31 décembre 2020, partant du principe qu'il n'existait aucune raison pour que leur suivi cesse au lendemain de leur majorité. Nous avons également consulté les chiffres de l'Insee pour déterminer l'âge de sortie du système scolaire universitaire de chacun de ces jeunes de 17 ans. On compte ainsi 84 000 jeunes, contre 30 000 effectivement accompagnés, soit un écart notable. Pour être en mesure de soutenir ces 84 000 jeunes, il serait nécessaire de débourser 2 milliards d'euros. Cette somme permettrait d'assurer un accompagnement complet et permettre aux jeunes de devenir un atout pour notre société, plutôt que de les abandonner du jour au lendemain, comme c'est encore trop souvent le cas aujourd'hui.