La France dispose naturellement d'atouts. Mais je souhaite revenir sur le premier point que vous avez évoqué concernant la qualité des services publics français. En la matière, je ne peux m'empêcher de retenir un constat relativement sévère, notamment sur le service public de l'éducation, qui souffre énormément. Il me semble à la fois que les enseignants expriment une grande frustration concernant leur métier et que les parents d'élèves n'en sont pas satisfaits.
Ayant commis, il y a quelques années, un rapport sur l'enseignement supérieur, laissez-moi vous donner une illustration. À tort ou à raison, les parents d'élèves considèrent aujourd'hui que l'université française n'est plus en mesure de proposer une voie de réussite à leurs enfants. Dans ce cadre, ceux qui disposent des moyens de réussir se répartissent globalement en deux catégories : ceux dotés d'un capital social – les enfants de professeurs – et ceux qui bénéficient d'un capital financier important. Ces possibilités leur permettent soit de choisir les bonnes options pour intégrer les voies les plus sélectives pour être sûrs d'échapper à l'université ; soit, de plus en plus, de partir à l'étranger. L'enseignement supérieur français est ainsi marqué par un départ des élites vers les universités britanniques et les universités américaines, ou des écoles privées qui se développent considérablement en France, afin d'échapper à l'enseignement supérieur national. Ce « vote avec les pieds » illustre bien que le service public éducatif français présente des marges de progression considérables. Cette situation est d'autant plus préoccupante qu'elle concerne l'avenir de nos jeunes générations.