L'erreur d'appréciation sur les prévisions est évidente, mais il faut s'interroger sur ses causes. Mon expérience me permet de témoigner de l'angoisse récurrente qui saisit le directeur du budget vers le 15 décembre, avant que ne tombent les indications sur les rentrées de l'acompte sur l'impôt sur les sociétés, dernier élément massif à caler dans la construction du budget. Cette angoisse s'est parfois avérée justifiée.
Je crois profondément que le consentement à l'impôt est fonction de la qualité des biens et des services que nous proposons à nos concitoyens. Si nous étions dans une situation où, pour la même quantité d'argent public, le système éducatif fonctionnait parfaitement et le système de santé répondait aux besoins de la population, la question du consentement à l'impôt serait moins prégnante.
S'agissant de la productivité, je crois qu'effectivement, les entreprises ont davantage embauché de personnes un peu moins qualifiées et ont davantage conservé les intéressés, y compris dans des périodes où le doute était permis quant à la poursuite de leurs activités, conduisant à une diminution faciale de la productivité. Désormais, il s'agit de savoir si les évolutions à venir, notamment en lien avec l'intelligence artificielle, susciteront de nouveaux gains de productivité. Les économistes s'écharpent sur cette question et je me garderai bien de prendre parti. Néanmoins cette question revêt évidemment une grande importance quant à notre capacité à dégager des recettes publiques supplémentaires sans augmenter les prélèvements, et donc à financer notre dépense publique.
Concernant le débat annuel entre déficit structurel et déficit conjoncturel, la question consiste à savoir quel est le niveau de croissance potentielle. Ici aussi, les économistes s'écharpent et je suis bien incapable de les départager. En revanche, je sais que cette notion est néanmoins très précieuse pour apprécier la position de nos finances publiques dans le cycle et par conséquent orienter les décisions du Gouvernement et du Parlement. Il s'agit malgré tout d'un indicateur de pilotage des finances publiques, dont il est difficile de se passer.