Le deuxième défi est celui de la coopération OTAN-UE qui est également un objectif de la RNS. Notre pays soutient en effet « une modernisation, un élargissement et un approfondissement du partenariat UE-OTAN, pour prendre en compte les nouveaux défis de sécurité qui pèsent sur l'Europe ».
Cette coopération est inscrite dans les traités européens, « la Boussole stratégique » et dans le Concept stratégique de l'OTAN. Elle repose sur une évidente complémentarité entre les deux organisations : l'OTAN a les moyens militaires dont l'UE ne dispose pas et l'UE les moyens humains, financiers et juridiques dont l'OTAN ne dispose pas. Or, les crises actuelles sont multiformes et exigent, pour y faire face, que des moyens très différents soient mobilisés.
La guerre en Ukraine a encore renforcé l'intérêt de la coopération UE/OTAN en mettant en évidence l'importance de ce qu'on appelle la mobilité militaire. En effet, l'efficacité de la défense collective implique de faire circuler, le plus rapidement possible, soldats, matériels et munitions à travers l'Europe. Or, les contraintes administratives, douanières et techniques sont susceptibles de compliquer considérablement la réponse de l'Alliance en cas d'agression armée sur le flanc Est. Fort de ce constat, les deux organisations travaillent à ce projet de créer un véritable « Schengen militaire ».
Le problème, c'est que cette coopération est largement bloquée. Certes, des déclarations sont signées, des réunions ont lieu entre fonctionnaires mais il y a peu de réalisation concrètes et les échanges politiques sont très limités, sinon inexistants. De surcroît, l'échange d'informations classifiées est toujours impossible en raison du différend entre la Turquie et Chypre.
Là est en effet le principal point de blocage de la coopération OTAN-UE : un des membres de l'OTAN – la Turquie – ne reconnaît pas l'un des membres de l'Union européenne : Chypre, dont il occupe d'ailleurs une partie du territoire depuis 1974. Dès lors, la Turquie bloque systématiquement la transmission d'informations classifiées de l'OTAN vers l'Union européenne, ce qui est pour le moins fâcheux puisqu'une part considérable des enjeux communs aux deux organisations sont couverts par le secret-défense.
Si relever ce défi de rétablir des relations formelles entre l'UE et l'OTAN apparaît compliqué, notre pays peut relever le défi du « renforcement du pilier européen au sein de l'OTAN », autre objectif de la RNS, à la triple condition suivante :
– la première est de définir de ce « pilier européen » qui est, comme d'autres concepts de la RNS, particulièrement flou.
– la deuxième est de rallier nos partenaires européens. Nombre d'entre eux, qui ont l'OTAN comme clé de voûte de leur politique de défense, sont particulièrement suspicieux vis-à-vis de toute initiative susceptible d'affaiblir l'Alliance, en particulier lorsqu'elle vient d'un membre comme la France, dont la singularité fait toujours planer un doute sur la sincérité de son engagement dans l'OTAN.
– enfin, la dernière condition, par ailleurs liée à la deuxième, sera de convaincre les États-Unis que le renforcement de ce pilier européen est dans leur intérêt.