La société est de plus en plus fragmentée. Lorsque j'étais élu territorial, il m'est souvent arrivé de rencontrer des habitants de lotissements qui se plaignaient des odeurs de fumier… Les habitudes des agriculteurs sont confrontées à celles des nouveaux arrivants. Le livre L'Archipel français, de Jérôme Fourquet, a mis en évidence la coupure entre les métropoles et la ruralité. La souveraineté alimentaire ne pourra être assurée que par une ruralité vivante, avec des PME, des restaurants, des bars où les gens se retrouvent – malheureusement, de moins en moins. La ruralité, ce n'est pas seulement l'endroit où l'on va se promener le week-end entre les champignons et les petits oiseaux !
L'évolution de la position sur les pesticides n'est pas sans lien avec les fake news diffusées sur les réseaux sociaux. On craint désormais de manger les produits traités, mais ceux qui habitent en zone rurale savent de quoi il retourne : ils continuent de vouloir acheter, en direct ou sur les marchés, ces produits sains, sûrs et tracés.
Par ailleurs, le discours négatif tenu par les agriculteurs eux-mêmes sur la difficulté de gagner leur vie, sur la dureté du métier, le manque de candidats à l'installation et le nombre élevé de suicides – j'avais, à l'époque, lancé une mission de prévention – donne aux gens le sentiment que l'agriculture est en déclin. Jérôme Fourquet cite un sondage selon lequel 80 % des Français n'inciteraient pas leurs enfants à travailler dans l'agriculture – cela étant, si les 20 % restants y allaient, nous serions tirés d'affaire !
La loi d'orientation agricole fait le choix d'une agriculture productive et contient de bonnes mesures en faveur de l'encouragement à l'installation de nouveaux agriculteurs et de la formation aux métiers de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Il faudra également repenser les relations commerciales, pour permettre à l'ensemble de la chaîne de bien gagner sa vie.