Je n'ai pas connu la centralisation de la protection de l'enfance, étant arrivé dans le secteur après cette période. D'après ce que j'entends, la situation n'était pas meilleure auparavant. Je pense qu'il est pertinent de partir des territoires et des problématiques spécifiques qu'ils rencontrent. Cependant, il est nécessaire que l'État assure une régulation. Nous avions proposé que le préfet de département siège dans des commissions afin de garantir un regard étatique sur la politique de protection de l'enfance. Il est essentiel d'assurer une égalité de traitement pour tous les enfants protégés sur l'ensemble du territoire national, afin d'éviter toute disparité. Par exemple, un département ne devrait pas se permettre de développer des places hôtelières pour des enfants présentant des troubles sévères de la personnalité ou du comportement, et ayant vécu des ruptures de placement en raison de ces troubles. Les réponses apportées ne sont pas toujours adaptées aux besoins des enfants et ne sont pas toujours dignes de ce que nous leur devons.
Je ne plaide pas nécessairement pour une recentralisation, mais il est évident que la situation actuelle est insatisfaisante. Il est impératif d'améliorer la régulation et l'harmonisation des politiques publiques sur les territoires. Comme l'a mentionné la rapporteure Isabelle Santiago, certains départements doivent suivre 22 000 enfants, tandis que d'autres n'en comptent que 400 ou 700. De quoi parlons-nous ?
Il me semble judicieux de ne pas se limiter aux catégorisations que j'ai évoquées dans mon propos liminaire, telles que les mineurs non accompagnés, auparavant désignés comme mineurs isolés étrangers, les cas complexes, les semi-autonomies, les autonomies, les jeunes majeurs, etc. Un enfant reste un enfant. Nous plaidons pour que tous les enfants vivent ensemble dans le creuset républicain, sans disparité ni insuffisance de moyens pour accueillir les mineurs non accompagnés, qui méritent autant que les autres de bénéficier du dispositif de protection de l'enfance. Je n'ai pas de position tranchée sur la recentralisation ou le maintien de la décentralisation, mais je préconise une régulation par l'État.
Concernant les contrôles, les enquêtes, les enquêtes flash et les évaluations, nous vivons une époque où la prise de risque est devenue quasi impossible et où l'on exige un risque zéro. Or, en matière de protection de l'enfance, le risque zéro n'existe pas. La responsabilité doit être partagée entre le magistrat, l'ASE et l'établissement qui accueille l'enfant. Tout ne peut pas reposer sur l'établissement d'accueil. Les défaillances de l'ASE, qui peine à recruter des éducateurs référents dans certains départements et reporte parfois sa mission sur les établissements, constituent un problème à résoudre. Les projets pour l'enfant ne sont pas encore déployés dans tous les départements et dépendent parfois des établissements associatifs habilités. Il reste donc beaucoup à accomplir dans ce domaine.