Afin de provoquer un changement significatif, les politiques publiques doivent adopter une approche de sédimentation plutôt que de constante alternance. Cela a été clairement illustré par Roxana qui a expliqué comment elle a renforcé et développé des dispositifs que nous avions précédemment envisagés ou impulsés. Cela m'a rappelé la récente constitutionnalisation de l'IVG. Ce progrès, majeur pour notre pays, a été rendu possible par l'accumulation de dispositifs légaux qui ont renforcé la place de l'IVG dans notre système. Majorité après majorité, nous avons renforcé l'IVG et corrigé les problèmes associés. Ce droit s'est finalement normalisé, jusqu'à sa constitutionnalisation qui n'a pas été source de scandale ou de tensions exagérées.
En ce qui concerne l'égalité entre les femmes et les hommes dans le sport, il est crucial de partir des acquis et de les améliorer. C'est dans cette optique que je réponds aux questions concernant l'occupation majoritairement masculine de l'espace public sportif et le sous-financement, public ou privé, des activités sportives féminines. Je pense que la solution réside dans l'acceptation d'une forme de discrimination positive en faveur de la pratique sportive féminine. Je serais notamment favorable à une taxe spécifique pour le financement du sport féminin, similaire à la taxe Buffet. Il me semble que les progrès accomplis nous permettent désormais d'envisager ce type de mesures.
Concernant la question du vivier de talents, l'analogie avec d'autres domaines où la parité est appliquée est pertinente. Lors de l'instauration de la parité en politique, nous avions été averties du risque de ne pas trouver suffisamment de femmes. L'expérience a toutefois démontré que les sanctions financières peuvent inciter les partis politiques à préparer, en amont, leurs viviers de talents féminins. C'est une leçon dont nous pourrions nous inspirer concernant le monde sportif, en l'incitant par la pression à constituer ses forces vives. Cependant, constituer un vivier de femmes ne suffit pas à assurer leur place au sein des instances dirigeantes. Il faut également prendre en compte, tout comme en politique, les conditions d'exercice de ces responsabilités, qu'elles soient pratiques, comme l'accompagnement de la maternité, ou psychologiques. Je suis consternée par la violence que subissent les femmes qui exercent des responsabilités politiques. L'expérience d'une femme en politique est différente de celle d'un homme, et cette situation se retrouve malheureusement dans le sport. Le cas de Brigitte Henriques, à la tête du CNOSF, est particulièrement révélateur, et j'estime que nous n'aurions pas dû accepter que son mandat se termine de manière aussi brutale et violente. Ces situations, que les femmes observent et s'approprient, peuvent les dissuader d'exercer des responsabilités. Il appartient donc aux pouvoirs publics de veiller à ce que ces responsabilités puissent être exercées dans des conditions sereines et confortables.
Je souhaite enfin souligner l'importance de l'école dans l'apprentissage de la pratique sportive, qu'il s'agisse des cours d'EPS ou des licences de l'UNSS. Les pouvoirs publics devraient par exemple réduire le coût de la licence UNSS pour les populations les plus défavorisées, afin d'encourager la pratique des garçons comme des filles. Par ailleurs, toutes les mesures favorisant une pratique sportive étendue, telles que la réforme des rythmes scolaires, sont bénéfiques pour le sport féminin.