Intervention de le professeur Rémi-Henri Salomon

Réunion du mercredi 29 mai 2024 à 17h15
Commission d'enquête sur les difficultés d'accès aux soins à l'hôpital public

le professeur Rémi-Henri Salomon, président de la commission médicale d'établissement centrale de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, président de la conférence des présidents de commission médicale d'établissement de centre hospitalier universitaire (CHU) :

L'année dernière, lorsqu'il a été présenté au Sénat, j'ai soutenu le projet de loi promouvant l'idée qu'un infirmier ne devrait pas avoir plus de patients qu'il ne peut en gérer correctement. La France est l'un des rares pays où les ratios ne sont pas clairement définis, même si certains existent, par exemple lors de la construction d'un hôpital. Avant la pandémie de covid-19, les ratios étaient généralement compris entre douze et quinze patients par infirmier, même si ces chiffres varient en fonction du type de service et d'activité. Seule la réanimation dispose actuellement de ratios normés.

Idéalement, le cadre médical et paramédical devrait pouvoir définir ses besoins et annoncer le nombre d'infirmiers nécessaires, en travaillant en confiance avec la direction. Cependant, l'établissement de ratios permet de garantir, lors de l'élaboration du budget de l'hôpital, que les besoins en personnel sont pris en compte. Pendant la pandémie de covid-19, les ratios ont été modifiés et ces changements ont perduré, car, sans cela, il n'y aurait plus eu suffisamment de personnel.

Nous avons dû établir des ratios plus favorables, en réduisant le nombre de patients par infirmier. Ce projet de loi devrait bientôt être présenté à l'Assemblée nationale ; je vous encourage vivement à soutenir cette initiative. Cette perspective pourrait rendre les professions paramédicales plus attractives. Des recherches très sérieuses montrent que de meilleurs ratios améliorent la qualité des soins, y compris en termes de morbidité et de mortalité. Cet objectif nécessite également un budget national adéquat. À mon avis, il serait préférable d'adopter un plan pluriannuel d'investissements dans le domaine de la santé, comme c'est le cas pour l'armée. Un tel plan me semble essentiel pour améliorer la qualité des soins et offrir de meilleures conditions aux professionnels de santé.

Depuis la pandémie de covid-19, nous avons légèrement amélioré le recrutement des infirmiers, mais nous rencontrons encore des difficultés à les fidéliser. Or il est essentiel de maintenir un effectif d'infirmiers suffisant, notamment dans les CHU où les soins sont très techniques et requièrent une expertise particulière. Dans un service de pédiatrie, nous réalisons des actes très techniques. Si les infirmiers partent après deux ou trois ans, tous les efforts investis pour les former et les rendre compétents sont perdus. À l'AP-HP, nous avons observé une augmentation de la masse salariale grâce à un meilleur recrutement, mais nous faisons également face à une surcharge d'heures supplémentaires et d'intérim, engendrant des coûts supplémentaires.

Bien que nous ayons des ratios plus favorables et un effectif plus important, une grande partie des infirmiers a été formée pendant la pandémie de covid-19, affectant leur aisance dans les services très techniques. Pour qu'un service hospitalo-universaire fonctionne efficacement, il est indispensable qu'au moins un tiers ou un quart de l'équipe soit constitué d'infirmiers expérimentés. Actuellement, le sentiment de stress et d'insécurité pousse certains à quitter leur poste. Il est donc crucial de stabiliser les équipes pour garantir un environnement de travail serein et performant.

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