Depuis 2012, une obligation impose aux départements de transmettre leurs données. Une enquête du journal Le Monde, publiée il y a un peu plus d'un mois, révèle une situation alarmante. En plus de dix ans, seuls dix départements ont effectivement transmis leurs données via des logiciels obsolètes, coûtant annuellement au moins 50 millions d'euros. Ces chiffres ne couvrent pas l'ensemble des départements utilisant ces logiciels. De plus, les propriétaires de ces logiciels sont des entreprises domiciliées dans des paradis fiscaux. Il est impératif de creuser cette question. Les professionnels de l'ASE utilisent couramment le logiciel Iodas, censé faciliter la remontée des données. Cependant, la majorité des collègues dans ce secteur constateront que ce logiciel n'est pas utilisé de manière efficace.
Par ailleurs, les stratégies de lutte contre la pauvreté et de protection de l'enfance, qui ont amorcé un principe de contractualisation avec les départements en échange de financements publics supplémentaires, visaient notamment à obtenir des remontées d'informations plus précises. Ces stratégies établissaient des indicateurs et des règles à respecter en échange de financements, permettant ainsi d'obtenir des données plus fines que celles recueillies jusqu'à présent. Malheureusement, en 2024, nous n'avons aucun retour sur l'effectivité de ces stratégies. Nous ignorons si les départements ayant reçu des fonds de l'État ont respecté l'intégralité du cahier des charges. Il serait pertinent de poser la question à la direction générale de la cohésion sociale lors de son audition.
Concernant le rôle des préfets, je pense qu'il est impératif de fermer certains hôtels, notamment dans le Nord. Ces établissements accueillent des enfants de 8 à 13 ans non accompagnés, ce qui est inacceptable. Le préfet dispose du pouvoir de fermer ces structures et de charger le département de trouver des solutions alternatives. Nous ne pouvons tolérer, au vu des événements récents, de continuer à héberger des enfants de 8, 9 ou 10 ans dans des hôtels, en violation de la loi. Si le département doit débloquer 50 millions d'euros supplémentaires pour trouver des places en urgence ou augmenter les salaires des familles d'accueil afin d'en attirer davantage sur son territoire, il doit le faire. Il est inacceptable que les enfants subissent les conséquences de cette pratique illégale et dangereuse. La fermeture d'établissements et de structures touristiques me semble être une mesure raisonnable compte tenu de la gravité de cette situation.
Sur le plan sociétal, je remarque avec optimisme que l'Assemblée nationale a choisi de créer une délégation aux droits des enfants, ce qui constitue une avancée significative. Nous espérons que le Sénat suivra cette initiative.
Aujourd'hui, deux commissions d'enquête sont lancées : l'une sur les dysfonctionnements de l'ASE ; l'autre sur les victimes de violences sexuelles dans le monde de l'art et du cinéma. La place des enfants prend de plus en plus d'importance au sein du Parlement, particulièrement à l'Assemblée nationale. Ces efforts doivent être poursuivis.
Je tiens à souligner qu'il existe des possibilités d'engagement accessibles à tous, notamment le parrainage de proximité. En tant que fervent défenseur de cette initiative, je considère qu'elle permet de mettre en relation des membres de la société civile, des citoyens ordinaires désireux de consacrer du temps à un enfant, afin de construire une relation affective stable et durable. Ces personnes partagent bénévolement ces moments et ne font pas partie du système de l'ASE. Le parrainage de proximité crée également une forme de vigie citoyenne pour les enfants placés. Plus nous aurons de parrains et de marraines, mieux ce sera. La loi de 2022 oblige d'ailleurs les départements à proposer systématiquement un parrain ou une marraine à tous les enfants placés. Cependant, cet aspect de la loi n'est pas respecté.