L'instant que nous venons de vivre, c'est-à-dire la prestation de serment en commission d'enquête, pour bien connaître les jeunes qui sont ici présents, est un moment de grande émotion.
Le comité de vigilance est aujourd'hui représenté par trois illustres personnes Mmes Taillardat et Métro, M. Louffok, que nous sommes évidemment ravis de vous recevoir. Je sais que derrière les écrans, de nombreux jeunes écoutent et suivent nos travaux. Je les salue aussi.
Cette première audition marque le début d'une commission d'enquête que nous avons souhaitée pour éclairer le débat sur les manquements des politiques publiques en protection de l'enfance. Chaque mot a du sens. En tant que rapporteure de cette commission d'enquête, j'ai souhaité et proposé en effet à la présidente, qui a accepté et je la remercie, que notre audition donne en premier la parole aux jeunes. Nous devons en effet remettre au cœur des politiques publiques les premiers concernés, entendre leurs parcours et leur expertise. Cette audition éclairera grandement nos travaux, mais aussi les parlementaires qui peuvent moins bien connaître le sujet de la protection de l'enfance. C'est très important.
Nous le savons, la politique publique de l'enfance constitue un angle mort des politiques publiques depuis de nombreuses années. Depuis 2014, nous tentons de changer de paradigme, notamment avec la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance, dite « loi Rossignol », le plan « grande pauvreté » et la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, dite « loi Taquet ». Avant même la loi Taquet, ses travaux en tant que ministre, en 2019, ont également marqué cette période. Cependant, ces initiatives sont souvent survenues dans un contexte de crise grave de la protection de l''enfance.
Malheureusement, dans les territoires, bien que le législateur ait toujours souhaité être à la hauteur des attentes des enfants, cette volonté de changement ne se traduit pas dans les pratiques professionnelles locales. Une des réalités de la protection de l'enfance est qu'il s'agit d'un écosystème où l'on ne peut pas constamment opposer l'État et les départements. L'ensemble de cet écosystème porte une responsabilité majeure. La République a une responsabilité majeure envers ses jeunes et, à ce jour, je dois le dire, elle se comporte comme un parent défaillant pour les 377 000 enfants qui sont à sa charge.
Il est donc essentiel de mener vers l'autonomie un enfant en suppléance parentale, pour lequel nous devons le meilleur, c'est-à-dire l'autonomie et non pas des ruptures de parcours souvent trop nombreuses, à l'âge où il n'est pas encore en capacité d'être autonome.
Nous aurons à cœur de creuser toutes les difficultés, tous les manquements. Trop d'appels à l'aide ont été lancés ces derniers mois et ces dernières années, particulièrement depuis un an, par les associations, les travailleurs en première ligne, les présidents des départements de gauche. Nous avons eu droit à un plan Marshall, à l'initiative du Conseil national de la protection de l'enfance (CNPE). Les départements de gauche ont demandé officiellement la mise en place d'états généraux.
Nous ne pouvons pas rester indifférents. Il y a cette réalité, il y a une prise de conscience des drames silencieux qui se jouent à l'aide sociale à l'enfance (ASE), qui n'est pas au rendez-vous. Nous ne pouvons pas continuer à ne plus nous mobiliser au sujet de vies brisées, de décès.
On investit 10 milliards d'euros en faveur de la protection de l'enfance, pour des résultats qui ne sont pas aujourd'hui au rendez-vous, en sachant que cela coûte aussi des milliards à la société de ne pas investir dans l'avenir. Je souhaite que votre éclairage puisse être le fer-de-lance qui nous mobilise tous pour avancer en tant que législateur.