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Intervention de Bruno Cabrillac

Réunion du samedi 28 octobre 2023 à 9h05
Commission des affaires étrangères

Bruno Cabrillac, directeur de la Fondation pour les études et la recherche internationale (FERDI), ancien directeur général-adjoint en charge des études, des recherches, des statistiques et de l'international à la Banque de France :

Vos questions sont pertinentes et permettent de revenir sur deux points majeurs de confusion dans le débat. On affirme qu'il est nécessaire de réformer le système en raison d'une forte demande de souveraineté monétaire, que ce soit au niveau régional ou national. Cependant, certaines propositions, comme celle de mon voisin, suggèrent que la France renonce unilatéralement à sa garantie. Cela me semble totalement contradictoire. Il faut attendre une demande explicite et je crois que le ministre des finances français a été très clair à ce sujet : si les Africains demandent le retrait de la garantie, la France le fera. Mais il n'y a rien de plus préjudiciable à la souveraineté monétaire que de prendre des mesures unilatérales et de retirer cette garantie.

La même confusion règne dans le débat sur les unions monétaires. Il existe des tendances centrifuges évidentes. Pourquoi le Sénégal et pourquoi maintenant ? Ce n'est pas seulement en raison d'un changement de régime démocratique. Le Sénégal va devenir un producteur de pétrole et disposera de ses propres réserves, qu'il ne souhaite pas partager, contrairement à la situation antérieure. Cela représente un degré de mutualisation très élevé.

Comme l'a souligné Mme Laffiteau précédemment, la Côte d'Ivoire a emprunté sur les marchés internationaux à des taux très élevés afin de contribuer aux réserves globales. Elle en supporte le poids et en fait bénéficier d'autres pays, notamment les pays sahéliens et le Sénégal. Aujourd'hui, les réactions de ces pays, en particulier du Sénégal, montrent que dès qu'ils cessent d'être bénéficiaires pour devenir pourvoyeurs de devises, des tendances centrifuges apparaissent. Il y a ici une confusion entre le débat politique et le débat économique. Ces tendances centrifuges, qui ont une réalité économique indéniable, sont contredites par le discours politique prônant toujours la création d'une monnaie.

Je trouve assez extraordinaire de justifier ce retour à une monnaie nationale pour des raisons probablement égoïstes, sous couvert d'une perspective de monnaie régionale, voire panafricaine, dont on sait pertinemment qu'elle est, au mieux, à très long terme et, au pire, illusoire. Ce débat est empreint de nombreuses confusions et l'on demande tout et son contraire, parfois de manière contradictoire.

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