Je vous remercie de vos interpellations et de vos présentations car il était temps que notre commission aborde ce sujet. La monnaie est l'un des attributs du pouvoir régalien des États et la dépendance de la zone CFA à la politique monétaire de la zone euro constitue une aberration complète. Il est impératif que ces États se libèrent enfin de cette survivance coloniale.
L'urgence est donc que la France renonce à ses intérêts propres et cesse toute ingérence dans la politique monétaire et économique de ces peuples. Les peuples d'Afrique de l'Ouest aspirent à ce que l'on appelle « la deuxième indépendance » : après l'indépendance politique, ils recherchent désormais l'indépendance économique et monétaire. La récente élection de Diomaye Faye au Sénégal en est peut-être aussi le résultat. Ce carcan monétaire, malgré la pseudo-réforme de 2019, n'a pas coupé le triple lien ombilical qui relie le franc CFA à la zone euro. Ce lien permet à toute entreprise présente dans la zone euro et commerçant dans la zone CFA de bénéficier d'une sécurisation de ses investissements sur le long terme grâce à la parité franc CFA - euro, de convertir ses profits réalisés en Franc CFA vers l'euro grâce à la convertibilité illimitée et de rapatrier ensuite ses capitaux vers la zone euro. Cela limite largement les rentrées fiscales de ces États.
Ce circuit de rapatriement des capitaux hors de la zone franc CFA grève les finances des États utilisant cette monnaie. Or, pour se désendetter, les États ne peuvent agir sur leur monnaie puisque le pilotage du franc CFA revient, de fait, à la Banque centrale européenne. La boucle est bouclée.
Comment agir aujourd'hui pour améliorer cette situation ? Vous avez abordé un certain nombre de solutions ; de nombreuses solutions semblent exister. Ce sera aux peuples et aux États de faire leur propre choix. En attendant, nous sommes à la commission des affaires étrangères en France. Qu'est-ce que la France peut faire pour pousser vers une réforme des droits de tirage spéciaux, par exemple, ce panier constitué par les plus fortes devises du monde et du Fonds monétaire international, pour permettre un financement plus juste de ces économies qui souffrent ? Et comment faire, d'après vous, pour accélérer à la fois l'aide à ces États qui souffrent de cet archaïsme monétaire et pour les aider à terme, selon leurs conditions, à sortir de cette situation ?
Enfin, j'insiste aussi sur la question des BRICS et des BRICS+ parce qu'ils ont évidemment, dans toutes leurs réunions, la question monétaire qui est posée, ainsi que leur approche par rapport à l'Afrique. Cela me semble important que nous vous entendions à nouveau là-dessus.